Intervention de Cédric Musso

Commission des affaires économiques — Réunion du 21 février 2018 à 10h00
Table ronde rassemblant des représentants de consommateurs

Cédric Musso, directeur de l'action politique d'UFC-Que Choisir :

L'affaire Lactalis fait suite à de nombreux scandales alimentaires, dont celui du Fipronil ou celui des lasagnes au cheval. Nous souhaitons des mesures de long terme pour éviter la répétition de ce genre d'affaires.

En ce qui concerne Lactalis, les défaillances sont intervenues dans les contrôles en amont, avec une détection trop tardive de la bactérie. L'Institut Pasteur a pourtant établi que cette bactérie était la même que celle mise en cause en 2005. Que s'est-il donc passé entre 2005 et 2017 ? Manifestement, les services de l'État n'ont pas été informés de certains contrôles positifs révélant la présence de pathogènes.

À cela s'ajoutent des défaillances dans la procédure de rappel des produits. UFC-Que Choisir avait déjà eu l'occasion de dénoncer l'ineffectivité du système à propos de certains détecteurs de fumée et cosmétiques. Même si le Premier ministre n'y voit qu'une fausse polémique, on ne peut minimiser l'effet des changements intervenus dans l'organisation de la DGCCRF. Les effectifs ont été diminués de 1 000 agents entre 2007 et 2012 et le fonctionnement pyramidal de la direction générale a été éclaté en directions interministérielles, de sorte que les missions des agents se sont accrues les obligeant à délaisser la surveillance des marchés. Il faudrait rétablir la chaîne de commandement si l'on veut que la DGCCRF intervienne de manière efficace.

L'information aux consommateurs est également insuffisante. Il manque un site unique où ils pourraient trouver des informations actualisées, en cas de rappel ou de retrait d'un produit. Dans l'affaire récente des jambons contaminés à la listeria, celui de la DGCCRF ne mentionnait pas l'ensemble des lots rappelés. Il faudrait aussi prévoir des messages d'alerte audiovisuels en cas de crise sanitaire d'ampleur. Pour l'instant, les consommateurs ne restituent en moyenne que 20 % des lots lorsqu'un produit est rappelé.

Le réflexe pénal est une autre piste à explorer, car il devrait revenir au juge pénal de faire toute la lumière sur les responsabilités en cas de contamination d'un produit. L'affaire Lactalis a fait éclater au grand jour les insuffisances du dispositif de réparation des préjudices en France. L'action de groupe de la loi Hamon est limitée au préjudice patrimonial, tandis que l'action de groupe en matière de santé ne concerne qu'une liste de produits où le lait infantile ne figure pas. Il faudrait une refonte de la philosophie des dommages et intérêts qui développerait un aspect punitif, à l'image de ce qui se fait dans les pays anglo-saxons. Les entreprises ne pourront réclamer davantage de liberté que si elles prennent davantage de responsabilités.

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