Intervention de Gisèle Jourda

Commission d'enquête état des forces de sécurité intérieure — Réunion du 14 février 2018 à 15h20
Audition de M. Christian Mouhanna chargé de recherches au centre national de la recherche scientifique cnrs directeur du centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales cesdip

Photo de Gisèle JourdaGisèle Jourda :

J'ai été très intéressée par votre exposé, car vous y avez fait apparaître des problématiques qui, pour les politiques, sont parfois difficiles à analyser.

De par mes fonctions, j'ai connu les différentes politiques qui ont été appliquées à nos forces de sécurité. C'est ainsi que les cartes judiciaires ont été modifiées. Dans mon département de l'Aude, nous comptions cinq tribunaux : il n'en reste plus que deux. Pour la justice de proximité et le suivi, ce n'est pas évident. On nous a expliqué qu'il fallait réduire les effectifs pour faire des économies.

Mon département disposait d'un maillage du territoire grâce à des commissariats et des gendarmeries adossés à des politiques de prévention de la délinquance. Dans une ville moyenne, on avait essayé de protéger au mieux les populations en lançant, dans les années 1980, les premiers conseils de prévention de délinquance regroupant la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), les commissariats, la gendarmerie. On arrivait à avoir des instances de débat entre la commune et les forces de sécurité. Les zones de gendarmerie et de commissariat n'ont pas rempli les mêmes missions.

On a aujourd'hui abandonné la police de proximité et condamné l'îlotage. Un certain nombre de jeunes policiers de l'Aude se sont installés en Île-de-France ou sont partis à Toulouse après la fermeture des commissariats.

Dans mon département, je n'ai pas les mêmes problématiques que celles que rencontrent les collègues qui se sont exprimés, mais le citoyen français doit avoir accès à la police et à la protection judiciaire de la même façon où qu'il se trouve.

En milieu rural, on en revient à présent à des brigades de gendarmerie plus denses, mais on a vu se développer des zones liées à la production de produits stupéfiants, et la criminalité est arrivée dans des zones rurales où personne ne serait jamais allé la chercher.

Vous avez dit que les policiers avaient du mal à trouver un sens à leur action. Vous avez même parlé d'une « direction floue ». Je voulais aborder la question de la formation des personnes qui en arrivent là.

Les problématiques ne sont pas les mêmes à Marseille, Tourcoing ou Paris, mais la délinquance existe partout. On constate un divorce entre la population et ses forces de sécurité, auxquelles elle était pourtant très liée. La base se sent oubliée !

J'ai été ce cambriolée deux fois. Cela peut arriver. Je n'ai pas dit qui j'étais. La gendarmerie est venue constater le premier cambriolage. Pour le second cambriolage, qui a eu lieu un samedi soir, ils n'ont pas pu se déplacer avant le lundi, faute d'effectifs !

Les deux tribunaux de l'Aude sont complètement engorgés. On a les mêmes problématiques que celles dépeintes par Samia Ghali. On n'a plus de suivi, les jeunes sont relâchés, et la population ne comprend pas.

Les politiques ne sont aujourd'hui plus audibles. Je souhaitais connaître votre sentiment. Notre rapport doit dégager des pistes pour améliorer la situation, afin de ne pas procéder à un empilage nouveau qui n'aboutira pas, faute d'y mettre les moyens financiers.

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