Intervention de Pascal Allizard

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 7 février 2018 à 9h50
Projet de loi autorisant la ratification de l'accord de partenariat et de coopération renforcée entre l'union européenne et ses états membres d'une part et la république du kazakhstan d'autre part — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Pascal AllizardPascal Allizard, rapporteur :

Nous examinons à présent le projet de loi autorisant la ratification de l'accord de partenariat et de coopération renforcé entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la République du Kazakhstan, d'autre part.

Ce nouvel accord est destiné à se substituer au premier accord signé en 1995. Il permettra d'améliorer et de moderniser le cadre de la coopération, en intégrant les grandes orientations données par la stratégie de l'Union européenne pour l'Asie centrale, et en mentionnant explicitement le respect des règles de l'Organisation mondiale du commerce dont le Kazakhstan est membre depuis novembre 2015.

L'objectif principal de l'accord est d'harmoniser les dispositions réglementaires dans plusieurs secteurs, et de renforcer la coopération sur les sujets internationaux.

Il comprend près de trois cents articles au total, répartis de manière thématique. Je présenterai brièvement les principaux volets.

Le premier volet aborde la question du respect des valeurs démocratiques et celle de l'État de droit, sur lesquelles insistent le préambule et le titre premier. L'Union européenne souhaite obtenir une amélioration de la situation politique au Kazakhstan en contrepartie du renforcement des relations contractuelles. Il faut noter à cet égard les efforts entrepris par le pays, notamment à travers la réforme constitutionnelle adoptée l'an dernier par le parlement kazakh, qui réduit les prérogatives présidentielles au profit des députés et du gouvernement.

Cet accord encourage les progrès dans ce domaine et les accompagne. À ce titre, l'Union européenne a instauré un dialogue annuel en matière de droits de l'Homme avec le Kazakhstan, et lancé une initiative pour l'État de droit en Asie centrale coordonnée par la France et l'Allemagne.

Le deuxième volet de l'accord est consacré au renforcement de la coopération dans les domaines de la politique étrangère et de la sécurité.

Le Kazakhstan est un acteur majeur dans sa région où il multiplie les initiatives diplomatiques en jouant un rôle modérateur ; le processus d'Astana en est l'une des illustrations. Le pays développe activement une diplomatie qu'il qualifie de « multivectorielle », consistant à trouver un certain équilibre en tissant des relations à la fois avec l'Union européenne et les grandes puissances voisines que sont la Russie, avec qui le Kazakhstan partage une histoire commune, et la Chine qui réalise des investissements importants à travers le pays dans le cadre de la nouvelle route terrestre de la soie.

Aux termes du titre II de l'accord, les parties s'engagent à coopérer pour le renforcement du rôle et de l'efficacité des organisations internationales telles que l'ONU et l'OSCE. Le titre II comprend également des engagements en matière de non-prolifération, de prévention des conflits régionaux et de lutte contre le terrorisme. L'Asie centrale est une région très fragile, et la coopération avec le Kazakhstan est importante à cet égard. L'ambassadeur du Kazakhstan, que j'ai eu l'occasion d'auditionner dans le cadre de l'examen de ce projet de loi, m'a assuré que son pays avait pris la mesure du risque terroriste en Asie centrale et que son gouvernement consacrait ses efforts à contrôler ses frontières - même si le Kazakhstan n'a pas de frontière commune avec l'Afghanistan - ainsi que les mouvements islamistes à l'intérieur du pays. Ce sujet donne lieu à des échanges très réguliers avec ses partenaires européens, dont la France, et cette coopération doit impérativement perdurer.

Le troisième volet est économique et commercial. Le Kazakhstan représente plus de la moitié du PIB de l'Asie centrale, ce qui fait de lui un point d'entrée incontournable pour le développement de l'économie de la région. Son sous-sol est riche en hydrocarbures, à tel point que le Kazakhstan est aujourd'hui notre deuxième fournisseur de pétrole, et le premier producteur mondial d'uranium, matière première nécessaire à l'exploitation de nos centrales nucléaires.

L'Union européenne est devenue son premier partenaire commercial, avec qui le Kazakhstan effectue environ le tiers de ses échanges commerciaux. L'Union européenne est également son premier investisseur étranger avec un stock de 42 milliards d'euros.

Le présent accord assure un meilleur cadre réglementaire pour les opérateurs économiques européens. Ainsi, les obstacles techniques au commerce sont réduits, l'établissement des sociétés est facilité, le droit de la propriété intellectuelle consolidé, et une transparence en matière d'accès et d'attribution des marchés publics est mise en oeuvre.

Cet accord de partenariat et de coopération renforcé n'est pas pour autant un accord de libre-échange qui supprimerait, comme c'est le cas dans les accords d'association, la quasi-totalité des droits de douanes et alignerait les réglementations économiques. En effet, l'adhésion du Kazakhstan à l'Union économique eurasiatique l'empêche, de fait, d'intégrer l'acquis communautaire. Toutefois, plusieurs dispositions faciliteront l'accès des entreprises européennes au marché kazakh, actuellement marqué par la prégnance du secteur public.

Les enjeux environnementaux ne sont pas absents des préoccupations kazakhstanaises, bien au contraire. Ces dernières années, le pays a ratifié les accords de Kyoto et de Paris et souhaite développer une économie verte grâce aux énergies alternatives. Aussi un engagement a-t-il été pris pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de 15 pour cent d'ici 2050.

Enfin, le dernier grand volet, et non le moindre, concerne la coopération financière et technique. Il vise à prévenir et à lutter contre la fraude et la corruption. Le Kazakhstan souhaite se conformer aux standards européens en la matière, afin de pouvoir intégrer l'OCDE. Dans le cadre de cette coopération, le pays peut bénéficier d'une aide financière de l'Union européenne, sous forme d'aides non remboursables ou de prêts. Il n'est en revanche plus éligible à l'instrument de coopération au développement de l'Union européenne, en raison d'un PIB par habitant trop élevé.

Pour conclure, la portée de cet accord est certes symbolique en raison de son caractère peu contraignant. Il constitue malgré tout un pas important pour l'Union européenne dans sa volonté de renforcer son engagement politique et économique en Asie centrale.

En conséquence, pour l'ensemble des raisons que je viens d'exposer, je ne peux que préconiser l'adoption de ce projet de loi. L'Assemblée nationale l'a déjà adopté en décembre dernier, et dix-neuf États membres de l'Union européenne ont d'ores et déjà ratifié cet accord.

Son examen en séance publique est prévu le jeudi 15 février prochain, selon la procédure simplifiée, ce à quoi je vous propose de souscrire.

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