Intervention de Jean-Marc Pastor

Réunion du 21 mars 2006 à 21h30
Organismes génétiquement modifiés — Articles additionnels après l'article 3

Photo de Jean-Marc PastorJean-Marc Pastor :

En la matière, il y a manifestement une différence d'approche entre nous. Sur ce sujet des OGM, la vraie question qui se pose à tous est de trouver un biais afin de pouvoir être en phase avec la population et l'ensemble de la société. Or, depuis dix ans, je constate avec regret que nous persistons dans la même voie. Dans ce domaine, je le dis très honnêtement, ni les uns ni les autres n'avons démontré que nous détenions la vérité, qui, seule, aurait permis d'obtenir l'adhésion de toute la société.

Depuis dix ans, nous persistons à nous convaincre que la classe scientifique est la seule à détenir la vérité, sous prétexte qu'elle a l'intelligence de s'exprimer avec un vocabulaire propre. D'un côté, il y a donc la communauté scientifique, qui vit et évolue à l'intérieur d'une bulle, et, de l'autre, il y a la société. Entre les deux, le gouffre qui s'est créé continue à se creuser. Finalement, une telle situation est compréhensible, puisque, notre collègue François Fortassin l'a rappelé fort à propos tout à l'heure, les scientifiques ont du mal à communiquer.

Malgré ce constat, nous, élus, représentants du peuple, continuons à faire la même erreur depuis dix ans. Alors que nous devrions être capables de franchir le pas, nous butons sur cette question, en refusant de changer notre fusil d'épaule. Nous ferions mieux de nous interroger pour trouver le moyen de rétablir la communication avec nos populations.

C'est pourquoi, aujourd'hui, nous vous proposons la création d'une commission locale d'information et de suivi. Pour autant, nous n'entendons pas entrer dans les détails et déterminer, dès à présent, son périmètre d'intervention et les acteurs concernés. Nous souhaitons justement laisser le champ libre à toutes les initiatives dans ce domaine, car nous avons pleinement conscience qu'il faudra bien plus que quelques minutes pour régler toute la question.

Du reste, il importe de reprendre la balle au bond, sous la forme d'une commission locale ou sous une autre. En tout état de cause, même si le conseil des biotechnologies fonctionne correctement, ce n'est pas cette instance qui, de Paris, permettra, tout à coup, de mieux faire comprendre la situation aux habitants de ma région, au plus profond du Tarn, de l'Aveyron ou des Pyrénées. Si nous ne mettons pas en place des déclinaisons de cette structure au niveau local, dans dix ans nous serons toujours confrontés au même problème de communication avec nos populations.

Si nous ne prétendons absolument pas détenir la vérité sur cette question, nous souhaitions profiter de ce débat pour la poser, par le biais de cette commission locale. De grâce ! monsieur le ministre, - et j'insiste sur ce point - ne croyez pas qu'il y ait des gens qui soient vraiment contre les OGM. En ce qui nous concerne, nous nous interrogeons avec vous, sans avoir la moindre certitude, sauf celle de notre incapacité, jusqu'à présent, à être en phase avec nos populations.

Si vous nous proposez un schéma intangible, à quel point en serons-nous dans cinq ans ? Ce n'est pas parce que nous aurons transposé une directive européenne que nous aurons avancé sur la question des OGM dans notre pays ! Nous en reparlerons s'il le faut. Mais, si rien ne change, dans quelques années la situation sera malheureusement toujours la même.

En définitive, monsieur le ministre, je formulerai une double remarque.

Premièrement, à l'occasion de ce texte de loi, il était urgent et nécessaire de garantir non seulement à la classe scientifique, mais aussi à l'ensemble de la population, que les OGM feraient l'objet d'une expertise scientifique réalisée par un organisme public. Or vous venez à l'instant de rejeter notre proposition d'amendement tendant à cette fin, sous prétexte que cela était déjà prévu. Si c'était vrai, pourquoi les scientifiques seraient-ils alors si démobilisés, pourquoi le peuple de France exprimerait-il son incompréhension et ses inquiétudes ?

Deuxièmement, alors que nous vous proposons de trouver un accord, à partir d'un projet que nous sommes prêts à revoir et à corriger, vous le rejetez purement et simplement.

Ce faisant, vous marquez votre refus sur les deux points majeurs qui expliquent le blocage actuel. Le moment est pourtant venu de régler non seulement la question scientifique à proprement parler, mais aussi la question de société, car, je le répète, nous ne sommes plus capables aujourd'hui d'être en phase avec notre société. C'est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, je vous le dis très honnêtement : vous faites erreur !

Nous avons voulu profiter de ce débat pour lancer cette idée de commission locale d'information de manière officielle, car elle mérite un vrai travail de fond. J'espère que nous y reviendrons en deuxième lecture, car il serait regrettable que vous n'acceptiez pas une telle ouverture. Encore une fois, il est urgent de trouver un biais pour régler la question et éviter qu'une poignée de scientifiques et quelques autres prennent les décisions depuis Paris. Ce n'est pas ainsi que nous réussirons à mieux faire comprendre les OGM et leurs enjeux à nos populations.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion