Intervention de Jean-Pierre Osenat

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 7 mars 2018 à 9h40
Attractivité et compétitivité juridiques du marché de l'art français — Table ronde avec des représentants des professionnels

Jean-Pierre Osenat, président du Syndicat national des maisons de ventes volontaires :

Le déclin du marché de l'art, pour moi, n'est pas inéluctable. Effectivement, nous sommes passés de 60 % à 6 % de parts de marché, mais, pour siéger à la Fédération européenne des commissaires-priseurs, je puis vous assurer que les commissaires-priseurs français ont tout à fait les compétences pour relever le défi et redynamiser le marché de l'art. Encore faut-il leur offrir les conditions d'une nouvelle attractivité et d'une nouvelle compétitivité.

Or nos systèmes de régulation constituent des freins. Faites donc confiance aux professionnels ! Le système de tutelle sur les sommes placées, mis en place depuis 2001, est totalement archaïque ; il pénalise notre compétitivité et notre attractivité.

Il y a une bonne et une mauvaise régulation. Nous ne sommes pas partisans d'un libéralisme effréné, d'une absence de cadre, nous souhaitons simplement une autorégulation. Il faut redonner aux professionnels la possibilité de défendre leur métier et de défendre le marché de l'art français. Plusieurs problèmes, qui nuisent à l'image du marché de l'art, ne sont pas réglés par le système actuel d'autorégulation. C'est notamment le cas des faux objets qui circulent sur le marché de l'art.

Je suis président d'un syndicat qui a été créé en 2001, au moment de la réforme des commissaires-priseurs. Nous avons 150 adhérents environ, dont les cotisations sont volontaires ; elles s'ajoutent à celles qui sont dues au Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères. Nous représentons 73 % du marché de l'art, puisque nous comptons parmi nos adhérents les plus grands (Sotheby's, Christie's, Artcurial, Tajan, Cornette de Saint-Cyr, etc), comme des commissaires-priseurs en région dont le chiffre d'affaires est bien moindre. Notre représentativité est donc réelle.

L'image de la France est meilleure à l'étranger. Le moment est propice pour que les commissaires-priseurs français fassent entendre une voix plus forte sur la scène internationale. Ils commencent déjà à faire venir des objets et des collections de l'extérieur. Il n'est pas inéluctable, à mes yeux, que 70 % à 80 % des oeuvres d'art quittent la France, qui est un véritable grenier, alors que nous n'importons en France qu'un nombre extrêmement limité d'objets.

Le marché de l'art français est tout à fait capable de défendre sa place, mais le Conseil des ventes volontaires, qui a eu sa justification en 2001 lors de sa création, est devenu pour nous un régulateur obsolète. Cela a déjà été souligné, voilà deux ans, dans le rapport fait part MM. Herbillon et Travert, au nom de la commission des affaires culturelles et de l'éducation de l'Assemblée nationale, qui préconisait une réforme de la régulation.

L'existence de ce Conseil des ventes volontaires n'apporte aucune garantie de plus au marché de l'art français par rapport à New York ou à Londres. Si les acheteurs ont aujourd'hui besoin de garanties, c'est aux commissaires-priseurs de les leur donner. Nous ne pouvons plus laisser se développer des scandales tels que ceux qui ont été étalés ces derniers temps sur la place publique. Nous devons créer notre propre système d'autorégulation pour faire en sorte que des objets contestables ne puissent plus avoir accès au marché français. Le Conseil des ventes volontaires, lui, ne doit s'occuper que des infractions au quotidien, qui sont du reste minimes, mais qui portent atteinte à notre image.

Les commissaires-priseurs ont changé ; le monde a changé. Nos concurrents d'aujourd'hui sont non plus les huissiers, mais les sites Internet sur lesquels on vend des objets grâce à un simple téléphone mobile. Il est temps de redonner ses lettres de noblesse à la vente aux enchères, en y apportant plus de transparence. La formation doit également changer. Peut-être faut-il passer plus de temps à apprendre aux jeunes la bande dessinée ou les arts d'Asie, qui ont aujourd'hui la part belle dans les ventes aux enchères. Nous avons l'énergie et la capacité pour mener ce travail.

Par ailleurs, les cotisations versées aux divers organismes sont aujourd'hui trop importantes. Le « trésor de guerre » du Conseil des ventes volontaires s'élève, je crois, à plusieurs millions d'euros. Il est temps que cela change. Nous-mêmes, les syndicats, devons évoluer, voire disparaître. Il s'agirait de garder une seule structure légère pour l'information, les commissions mixtes paritaires et la représentation en général. C'est le cas dans tous les autres pays.

Je ne plaide pas pour la suppression totale d'un contrôle par le Conseil des ventes volontaires. Mais tout le monde s'accorde à considérer qu'il faut le faire évoluer.

Faites-nous confiance, nous sommes des entrepreneurs très bien formés. Animés par notre passion pour le marché de l'art, nous pouvons le développer au-delà du seuil de 6 % atteint ces dernières années.

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