Intervention de Jean-Cyril Spinetta

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 14 mars 2018 à 10h00
L'avenir du transport ferroviaire — Audition de M. Jean-Cyril Spinetta

Jean-Cyril Spinetta, auteur du rapport sur l'avenir du transport ferroviaire :

On peut juger que c'est insuffisant, mais mon rapport aborde les aspects environnementaux. Je note par exemple que les transports représentent en France 30 % de la consommation d'énergie, mais le transport ferroviaire 0,6 % seulement.

Les zones de pertinence du transport ferroviaire que j'ai présentées tiennent également compte de son empreinte environnementale, un atout essentiel qui, à l'évidence, doit être pris en considération.

Je n'ai probablement pas eu le temps d'évoquer suffisamment le fret, même si j'y consacre quelques pages. Pour tenir compte des orientations bruxelloises, le précédent gouvernement avait, dans le cadre du contrat liant SNCF Réseau à l'État, demandé que les péages du fret soient relevés de 4,5 % en moyenne par an, alors même que les opérateurs, publics ou privés, sont en grande difficulté économique. Je suggère que les péages fret soient maintenus à un niveau inférieur au coût marginal, comme le permet la directive 2012/34.

Je propose également la création, au sein de SNCF Réseau, d'une filiale dédiée au fret. Beaucoup d'activités économiques dans notre pays, notamment les carrières, vivent grâce à une desserte ferroviaire leur permettant d'acheminer leur production. Or les relations entre SNCF Réseau et ces acteurs économiques sont insuffisantes pour l'heure.

Le fret ferroviaire SNCF a accumulé 4,3 milliards d'euros de pertes, ce qui représente 60 % de la dette portée par SNCF Mobilités. L'activité fret devra être recapitalisée et il est assez probable que les autorités européennes exigent sa filialisation, qui pourrait être aussi une opportunité de redémarrage pour le fret.

Le TGV est-il rentable ? L'année 2017 a marqué une amélioration considérable par rapport à la période 2008-2016, l'excédent brut d'exploitation passant de 537 millions d'euros en 2016 à près de 800 millions d'euros en 2017. C'est sur la base de ces derniers chiffres que j'ai formulé l'hypothèse de la rentabilité du TGV, à savoir la capacité d'assumer avec ses propres ressources l'ensemble des coûts d'opération et des investissements, sans s'endetter. C'est une perspective plausible pour les 5 années qui viennent, le seul point d'interrogation concernant l'effet de la concurrence sur la péréquation entre lignes rentables et non rentables.

Si le débat sur la rentabilité persiste, c'est parce que la SNCF applique une norme interne de rentabilité des capitaux investis de 8,5 % après impôts, à la demande de son actionnaire, contre 5,1 % pour les Allemands et 4,7 % pour les Italiens. Cette norme de rémunération du capital, fixée voilà plus de 10 ans, est aujourd'hui décorrélée de l'évolution des taux d'intérêt et mériterait sans doute d'être révisée à la baisse, ce qui permettrait à l'activité TGV de couvrir l'ensemble de ses coûts, opérations, investissements et rémunération du capital compris.

Vos préoccupations sur les petites lignes sont légitimes. Je me suis déjà longuement exprimé sur ce sujet. La lettre de mission du Premier ministre me demandait de travailler à « concours publics constants », une contrainte lourde qui ne me choque nullement et que j'ai voulu respecter à la lettre. Les concours publics sont de 14 milliards d'euros et ils augmentent régulièrement depuis des années.

L'état du réseau n'est pas optimal. Des efforts supplémentaires doivent porter en priorité sur les noeuds ferroviaires et la modernisation des lignes les plus utilisées.

Mes propositions ne me semblent pas en contradiction avec la notion de service public, nos concitoyens souhaitant disposer de services collectifs de qualité, ce qui n'est pas toujours le cas aujourd'hui.

Étant moi-même originaire d'un petit village corse et n'ayant pas toujours vécu à Paris, les notions d'aménagement du territoire et de ruralité ne me sont pas totalement inconnues. J'ai toutefois la conviction que le rail ne doit pas avoir l'exclusivité du service public de transport de personnes.

Le secteur conventionné - les TER -, c'est 1 milliard d'euros de recettes commerciales pour 4 milliards de coûts, dont 3 milliards de subventions. Par nature, la notion de rentabilité n'est pas pertinente pour ce service public, et j'ai moi-même eu tort d'utiliser ce mot dans mon rapport. La question est de savoir comment utiliser au mieux ces concours publics.

Sur le transfert des personnels, une question que nous avons étudiée en détail, je cède la parole à M. Colin, qui a beaucoup travaillé sur le sujet.

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