La situation financière de la Fondation Alliance française, je le répète, a fait l'objet d'un rapport des trois inspections - affaires étrangères, éducation nationale, intérieur -, lesquelles ont dressé le même constat que vous, monsieur le rapporteur. Les loyers dus par l'Alliance française Paris Île-de-France n'étaient plus payés depuis deux ans, mais son actuel président a décidé d'acquitter ces arriérés ; cette situation va donc changer. Les dépenses de la Fondation avaient également augmenté de façon non négligeable, du fait de la mise en place du plan « Alliance 2020 », lequel est assez ambitieux, en particulier en matière d'actions de formation et d'apprentissage de la langue française. La différence entre les dépenses et les recettes s'est donc accrue au cours des dernières années. Son déficit s'élevant l'année dernière à plus d'un million d'euros, la Fondation a demandé à l'État de lui accorder une subvention exceptionnelle ; or un tel complément de financement n'est pas facile à trouver en novembre ou décembre... Comme je l'ai indiqué, cette situation a provoqué la démission du président de la Fondation et d'une partie du conseil d'administration.
Dès lors, les différentes options sont les suivantes.
Première option, on peut choisir le statu quo : on garde la Fondation, en faisant en sorte qu'elle retrouve une base financière solide. Cette formule entraîne des contraintes. Il faudra revoir à la baisse ses missions et une partie de l'ambitieux plan « Alliance 2020 », de même que le nombre des salariés. L'actuel président étudie ces pistes. En bref, il s'agit d'assainir la situation financière pour permettre à la Fondation de repartir.
La deuxième option consiste à procéder à la dissolution de la Fondation, sans la remplacer. Ceux qui défendent cette option considèrent qu'il n'est nul besoin d'une tête de réseau, et que l'Alliance française Paris Île-de-France en fera office si cela est nécessaire. Cette situation, qui prévalait avant 2007, présentait beaucoup d'inconvénients : l'Alliance de Paris, en essayant d'assumer ce rôle de tête de réseau, se trouvait souvent en situation d'affronter l'État et le ministère des affaires étrangères. C'est pour résoudre cette difficulté que la décision avait été prise de créer la Fondation. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, il est probable, si l'on en revenait à la situation antérieure, que ces problèmes réapparaissent.
La troisième option sur laquelle j'ai travaillé, se situe entre les deux autres : il s'agirait de revenir à une structure plus légère. Peut-être faudrait-il dissoudre la Fondation, et la remplacer par une association d'utilité publique ; ou bien la conserver, mais réduire considérablement son champ d'action, et envisager un accord avec l'Alliance française Paris Île-de-France. Certains parlent de partager le patrimoine en deux. C'est compliqué, mais peut-être faisable si les deux parties font preuve de bonne volonté. On inventerait donc quelque chose de nouveau, une véritable tête de réseau dotée d'un statut juridique, d'une personnalité de droit moral, mais dont les attributions seraient limitées. Il faudrait également réduire le nombre de salariés, ceux qui ne resteraient pas au sein de la Fondation pouvant être réaffectés à l'Institut français ou à l'Alliance française Paris Île-de-France, notamment ceux qui travaillaient sur les questions relatives à la formation linguistique.
Il existe donc des solutions, mais il choisir entre ces trois options, ce choix relève des seuls pouvoirs publics français.
Selon moi, le pilotage du réseau est essentiel. Ceux qui plaident pour supprimer purement et simplement la tête de réseau ne mesurent pas les progrès réalisés depuis deux ou trois ans pour rendre plus rigoureuses la gestion et l'animation du réseau.
Il arrive que des personnes, ici ou là, utilisent le label « Alliance française » pour créer des structures, comme des sortes d'agences de voyages, qui ont parfois très peu de lien avec cette marque. Il faut donc un gendarme au niveau central, à Paris, pour dire que ce n'est pas conforme aux règles et principes établis. Ce n'est pas l'ambassadeur, au plan local, qui peut le faire, car il n'a pas la vision d'ensemble du réseau. Quand il s'agit d'introduire un recours contre de telles pratiques, il convient de bien connaître le droit de la propriété intellectuelle, et éventuellement les actions en justice de ce type qui ont pu être menées. Encore une fois, 835 Alliances à travers le monde, c'est considérable. Il faut une tête de pont pour faire ce travail. C'est une mission essentielle qu'il faut conserver à tout prix.
En cas de changement de statut, en particulier si l'on renonçait au statut de fondation, et de réduction du patrimoine, il faudrait se poser la question du mécénat.
La Fondation en a peu bénéficié. Aux dires de ses responsables, les entreprises privées qui souhaitaient financer l'action de l'Alliance française préféraient le faire au niveau local, en Afrique, en Amérique latine ou ailleurs, plutôt que de verser de l'argent au niveau central, au risque qu'il soit utilisé en partie pour payer des frais de fonctionnement. Les entreprises sont prêtes à aider - elles l'ont fait dans le passé pour soutenir les actions culturelles et éducatives de l'Institut français à travers le monde -, mais de préférence au niveau local. De même, avec les autres pays francophones, nous avons tout intérêt à envisager avec eux des actions sur tel ou tel projet concret qui se développerait au niveau local, plutôt que d'essayer de recueillir des fonds au niveau central, sans leur donner une affectation et une destination immédiates. Je sais par expérience qu'il est plus facile d'obtenir un financement pour un projet individualisé, très concret ; les donateurs ont alors une vision claire de la contribution qu'ils peuvent apporter. Je plaiderai donc pour une action décentralisée en ce domaine.