Intervention de François Molins

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 22 février 2018 : 1ère réunion
Audition de M. François Molins procureur de la république

François Molins, procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Paris :

Le « retentissement psychologique » renvoie, j'en conviens, à un langage un peu technocratique.

La question des moyens demeure une question compliquée. À Paris, je pense que nous avons la chance de disposer de plus de moyens qu'ailleurs. Par exemple, je dispose d'un cabinet pour m'épauler, avec un magistrat chargé de la prévention de la délinquance et de l'aide aux victimes. Il est certain qu'avec 136 magistrats et 360 fonctionnaires, nous bénéficions à Paris de plus de ressources que partout ailleurs. Pour autant, il ne suffit pas d'avoir des moyens : encore faut-il les utiliser. Je pense que ce que nous avons réalisé à Paris pourrait l'être dans d'autres territoires.

Des comités locaux d'aide aux victimes ont été institués au niveau départemental. Dans ce cadre, en principe, tous les dispositifs d'aide aux victimes ont été mis en cohérence. Ce modèle d'organisation est parti de l'expérience parisienne. Aujourd'hui, il est prévu qu'au niveau de chaque comité local d'aide aux victimes soit établi un schéma départemental. Ce travail exige du temps et des moyens, car il ne peut être fondé que sur un diagnostic précis de la situation. Sans ce constat, on ne peut pas corriger les dysfonctionnements et améliorer ce qui doit l'être. Lorsque tous les départements auront mis en place ce type de schéma, je pense que l'on observera des résultats intéressants.

Il existe, à mon sens, une deuxième condition à la réussite des politiques publiques, c'est la pérennité. Une action qui s'arrête deux ans après avoir été engagée ne sert à rien. Les politiques publiques doivent survivre aux acteurs administratifs qui les mettent en place et qui les portent. Or dans un certain nombre de départements, des actions intéressantes sont engagées, puis elles s'interrompent parce que le préfet ou le procureur a changé. Cela me paraît tout à fait anormal. Une politique publique qui n'est pas pérenne ne sert à rien. Elle se traduit par un gâchis de moyens. Je soutiens mes collègues procureurs, car on attend beaucoup de nous. Je pense toutefois qu'ils agissent aussi en fonction des moyens dont ils disposent. S'ils bénéficiaient de l'aide de chargés de missions spécialisés dans la politique de la ville et l'aide aux victimes, ils en feraient probablement davantage.

Le Garde des Sceaux reste le principal acteur de la politique pénale. La ministre a pris, en novembre 2017, une circulaire de politique pénale engageant l'ensemble des parquets à travailler la réponse pénale pour renforcer son efficacité. C'est dans ce cadre que j'ai inscrit le travail que je mène depuis plusieurs mois, mais cela ne suffit pas. Il faut, en parallèle, engager un travail de réseau qui renvoie directement aux comités locaux d'aide aux victimes, maintenant placés sous l'égide de la déléguée interministérielle aux victimes, Élisabeth Pelsez, qui travaille beaucoup sur le sujet. Il faut progresser dans ce domaine. Encore une fois, j'insiste beaucoup sur l'impératif de pérennité des politiques publiques.

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