Intervention de Annick Billon

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 22 février 2018 : 1ère réunion
Échange de vues sur les conclusions du groupe de travail de la commission des lois du sénat sur les infractions commises sur les mineurs

Photo de Annick BillonAnnick Billon, présidente :

Mes chers collègues, nous en venons à notre troisième point d'ordre du jour, consacré au groupe de travail de la commission des lois sur les infractions sexuelles à l'encontre des mineurs. La délégation y a été associée à notre demande. Notre collègue Laurence Rossignol y a été assidue et j'ai moi-même pu participer à certaines auditions.

Certains des participants à ce groupe de travail, auquel s'est joint le président de la commission des lois, ont déposé, le 12 février, une proposition de loi tirant les conséquences de certaines de leurs conclusions. Les signataires sont à ce jour, outre Philippe Bas, Marie Mercier, François-Noël Buffet, Maryse Carrère et Françoise Gatel.

Ce texte sera examiné le 27 mars en séance publique.

La proposition de loi prévoit notamment de prolonger le délai de prescription de l'action publique à trente ans, pour les « crimes et délits d'agression sexuelle commis à l'encontre de mineurs », ce qui est cohérent avec ce que nous avons entendu au cours de nos auditions.

En revanche, le groupe de travail traite la question du consentement sans définir un âge en-deçà duquel la relation sexuelle entre un majeur et un mineur serait considérée comme un viol. Nos collègues ont fait le choix de compléter la définition du viol inscrite dans le code pénal en y intégrant deux critères pouvant qualifier la « contrainte morale » : la différence d'âge entre victime et agresseur ou l'incapacité de discernement du mineur.

C'est une manière de contourner le débat sur l'âge minimal, sur lequel il n'y a pas d'unanimité. Le Défenseur des droits avait d'ailleurs attiré notre attention sur les effets pervers de la définition arbitraire d'un seuil d'âge, si l'on considère le cas de jeunes garçons majeurs depuis peu, ayant des relations consenties avec des adolescentes de 15 ans, voire moins. Les parents de ces jeunes filles pourraient porter plainte et faire de ces garçons des criminels sexuels, avec des conséquences très lourdes tout au long de leur vie.

De plus, le Docteur Ghada Hatem, lors de son audition du 14 décembre 2017, nous avait indiqué qu'elle suivait médicalement des jeunes filles à la sexualité précoce et « épanouie » (ce sont ses mots).

Ce débat mis à part, comment devons-nous donc réagir, en tant que délégation aux droits des femmes, à cette proposition de loi ?

Je rappelle que nous avons décidé dès le mois d'octobre 2017, d'aborder le sujet des violences faites aux femmes dans sa globalité. Dans cet esprit, nous avons procédé à de nombreuses auditions, notre objectif étant de nous préparer à la discussion du projet de loi annoncé par le Gouvernement. Il est en effet important que la délégation ait un rôle actif dans ce débat.

Le projet de loi devrait être rendu public prochainement.

S'agissant de la proposition de loi, il me semble difficile d'élaborer une position commune de la délégation d'ici son examen en commission.

Il faut en être conscient : malgré l'intérêt de ce texte, lui apporter d'ores et déjà notre soutien nous lierait nécessairement lors du débat futur sur le projet du Gouvernement.

Il ne me semble donc pas pertinent de solliciter la saisine de la délégation par la commission des lois et d'élaborer un rapport sur la proposition de loi de nos collègues.

L'âge du consentement est un vrai sujet, l'audition de François Molins nous l'a encore rappelé, et nous devons prendre le temps d'un débat entre nous.

De surcroît, les délais semblent très courts pour élaborer un document sérieux sur ce texte, qui n'embrasse d'ailleurs qu'un aspect de notre sujet.

Je vous propose donc la formule suivante :

- chacun d'entre nous interviendra dans le débat sur la proposition de loi, s'il le souhaite, à titre personnel ou en cohérence avec son groupe ;

- j'interviendrai pour ma part dans la discussion générale pour exposer notre méthode de travail et expliquer pourquoi nous n'avons pas, sur les mineurs, de position commune, même si, je le répète, nous saluons la qualité du travail de nos collègues de la commission des lois.

Notre souci est de ne pas anticiper sur nos propres conclusions à venir.

Cela vous convient-il ?

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