Monsieur Poadja, la ZEE de Nouvelle-Calédonie est effectivement victime de campagnes de pêche illicite, malgré les nombreuses interceptions aériennes et maritimes réalisées ces deux dernières années. Après la tempête Irma, j'ai souhaité qu'une réponse urgence soit apportée aux carences en matière de patrouilleurs et, dès 2019, un bâtiment dit « patrouilleur léger guyanais » (PLG) sera livré aux Antilles. Le présent projet de loi de programmation militaire prévoit, pour sa part, six nouveaux patrouilleurs pour les territoires d'outre-mer, dont deux destinés à la Nouvelle-Calédonie.
Je partage votre analyse, monsieur Patriat, sur la situation européenne peu rationnelle en matière d'équipements militaires, qui conduit à des problèmes d'interopérabilité et, surtout, montre la faible consolidation de l'industrie européenne de défense, alors qu'un tel phénomène est à l'oeuvre ailleurs. En Russie et en Asie, de nouveaux acteurs émergent, qui rend d'autant plus nécessaire de renforcer notre industrie. Il convient donc de renforcer les coopérations sur les programmes d'équipement comme avec l'Allemagne pour les chars de combat, les systèmes d'artillerie et les avions de patrouille maritime. Nous travaillons également avec l'Italie concernant les pétroliers ravitailleurs et avec l'Allemagne, l'Espagne et l'Italie sur le drone moyenne altitude longue endurance (MALE). Il est, en outre, nécessaire de structurer nos industries, sur le modèle de la fusion des groupes français Nexter et allemand Krauss-Maffei-Wegmann (KMW). Je me suis ainsi rendue récemment à Rome au sujet du rapprochement en cours entre l'italien Fincantieri et le français Naval Group. Face à la puissance américaine, nous devrions également assumer d'appliquer un principe de préférence européenne pour les programmes d'équipement. Mais de nombreux États continuent à acheter américain au détriment de nos industries, ainsi de l'achat récent, par la Suède, de missiles Patriot. La diversité des matériels utilisés en Europe doit être réduite en travaillant sur des programmes d'équipement communs, qui pourraient être favorisés, malgré les réticences de certains, avec la mise en oeuvre, en 2019, du fond européen de défense. Je crois, quoi qu'il en soit, que les États européens, confrontés pour beaucoup au terrorisme, ont pris conscience du nécessaire renforcement de la défense européenne. Il est évident pour chacun que les États-Unis, partenaires majeurs, ne peuvent pas pour autant toujours intervenir.
Mme Garriaud-Maylam a évoqué les relations entre l'Europe de la défense et l'OTAN. Il n'existe selon moi ni contradiction ni opposition : une Europe de la défense forte ne pourra que conforter l'efficacité de l'alliance atlantique. Parler d'effet d'éviction à cet égard, comme je l'ai récemment entendu lors de réunions de l'OTAN à Bruxelles et à Munich, constitue une erreur ! La croissance des dépenses militaires de la France en vue d'atteindre 2 % du PIB va d'ailleurs dans le sens des demandes de l'OTAN à ses membres et James Mattis, secrétaire à la défense des États-Unis, est favorable à cet objectif. Le Brexit ne doit pas faire oublier la puissance de l'armée britannique, avec laquelle nous souhaitons continuer à collaborer pour la défense de l'Europe, intention réciproque comme Theresa May l'a récemment indiqué à Emmanuel Macron. Nos attentes en matière d'exportation dans le cadre des programmes communs d'équipement sont effectivement élevées ; nous serons donc attentifs aux positions de la coalition allemande en la matière.
Pour ce qui concerne le prochain porte-avions, il s'agit de se donner les moyens, en menant les études adéquates, de savoir s'il convient ou non de lancer la production d'un nouveau bâtiment sans attendre arrêt du Charles-De-Gaulle, afin d'assurer la continuité de notre présence en mer et de prévoir une période de recouvrement entre les deux bâtiments. À terme, peut-être, un nouveau projet pourrait être lancé.
Les statistiques publiées par l'OTAN pour l'année 2016 montrent que les dépenses militaires des pays de l'alliance atlantique ont, en moyenne, progressé de 4,3 %. Elles atteignaient par exemple 1,2 % du PIB en Allemagne, 1,79 % en France, 1,19 % en Italie et 2,17 % en Grande-Bretagne. L'Allemagne prévoit d'augmenter ses dépenses de 1,2 à 1,5 milliard d'euros supplémentaires par an d'ici 2021. La France n'a donc pas à rougir de ses perspectives en la matière sur la même période : 1,8 milliard d'euros en 2018, puis 1,7 milliard d'euros en 2019, 2020 et 2021. La Grande-Bretagne, en revanche, confrontée au coût du Brexit et à l'achat coûteux d'appareils F-35 américains, pourrait voir passer ses dépenses de défense sous le seuil de 2 % du PIB.
Monsieur Poniatowski, nous ignorons effectivement ce que l'avenir nous réserve. En conséquence, pour les OPEX, nous devons travailler sous forme de provisions. Le passé nous a néanmoins appris qu'une dotation de 450 millions d'euros par an était insuffisante. Mais 1,1 milliard d'euros correspondra-t-il aux besoins à partir de 2020 ? Nul ne le sait, c'est pourquoi nous avons prévu que des financements interministériels viennent, le cas échéant, compléter cette enveloppe.
Enfin, monsieur Le Nay, nous travaillons actuellement à la mise en place du nouveau logiciel de paie Source Solde, qui remplacera le système Louvois. Il sera effectif dès que le bon fonctionnement en sera assuré, afin d'éviter les erreurs du passé. Dans cette attente, nous réglons les derniers trop perçus, tandis que Louvois s'est sensiblement amélioré : 97 % des soldes versées cet automne étaient sans erreur, 98 % en décembre.