On m'a fait part, il y a quelques temps, du fait qu'en fin d'année, les parcours des patrouilles étaient déterminés en fonction du carburant disponible.
Général Richard Lizurey. - Le carburant n'est plus une problématique aujourd'hui. En effet, j'ai débloqué une enveloppe de 2,2 millions d'euros supplémentaires pour ce poste de dépense. En revanche, nos gendarmes sont confrontés à des difficultés, en fin d'année, liées aux véhicules que l'on ne peut pas réparer. Ainsi, à partir de septembre, les véhicules en panne ou accidentés ne peuvent plus être remplacés.
Les relations avec les magistrats sont complexes et varient en fonction des unités. Les unités de recherche et de police judiciaire entretiennent de bonnes relations. En revanche, ces dernières sont un peu plus délicates avec les unités territoriales, qui ont parfois le sentiment d'investir beaucoup de temps dans les investigations, avec des résultats pénaux décevants. Je ne remets pas en cause les décisions judiciaires. Toutefois, je comprends que cela puisse ici ou là créer un sentiment de frustration pour nos gendarmes de voir à nouveau dans la rue, quelques jours à peine après leur passage devant le tribunal, des personnes qui ont fait l'objet d'une procédure longue et difficile.
Un autre point de frustration concerne les transfèrements. En effet, cette mission a été transférée à la pénitentiaire avec les ETP et les crédits correspondants. Or, dans de nombreux cas, on demande quand même aux gendarmes de l'assurer. J'ai donné la consigne de refuser les transfèrements indus, sauf bien entendu quand il s'agit de criminels de haut vol. Nous avons au quotidien des magistrats qui emploient des termes menaçants à l'égard des commandants de groupement ou de région, avec des termes discourtois, ce qui influe indéniablement sur le moral des troupes. On nous a enlevé les effectifs, et on nous demande quand même d'assurer cette mission ! Au final, la mission de transfèrement coûte aujourd'hui plus cher à l'État que ce qu'elle coûtait auparavant. Sur ce sujet, je défends mes personnels. Ce transfert est un échec collectif.
L'administration pénitentiaire dispose-t-elle des moyens et des compétences pour assurer cette mission ?
Général Richard Lizurey. - Elle a fait des efforts importants. Des audits ont été menés, avec des propositions pour procéder à une réorganisation en interne. Mais je ne suis pas assez connaisseur de l'administration pénitentiaire pour pouvoir dire où se trouvent les marges de progression.
Je connais des gendarmes qui continuent à être sollicités quasiment au quotidien pour intervenir en centre pénitencier, alors que les missions demandées devraient être accomplies par l'administration pénitentiaire.
Général Richard Lizurey. - Il est toutefois de notre mission d'intervenir en cas de troubles. Nous l'avons d'ailleurs vu lors des évènements intervenus dans les prisons le mois dernier. Ce n'est pas là qu'est la critique majeure des gendarmes. Dans les situations d'urgence, bien évidemment, il y a une solidarité avec les collègues de l'administration pénitentiaire.
Je parle de sollicitations hebdomadaires, voire quasi quotidiennes.
Général Richard Lizurey. - Je n'ai pas de remontées du terrain en ce sens.
Vous m'avez interrogé sur les conséquences de l'opération Sentinelle sur notre mobilisation. Il est vrai que nos escadrons de gendarmeries mobiles sont actuellement suremployés : 21 escadrons sur 109 sont en permanence en outre-mer, soit un cinquième des effectifs globaux. Mais, si l'on considère que le nombre d'escadrons disponibles est plutôt de 61 en moyenne, cela signifie qu'un tiers de mes escadrons disponibles sont déployés outre-mer. Les évènements à Mayotte font que le nombre d'escadrons déployés en outre-mer va passer à 23. Nous sommes également mobilisés sur Notre-Dame-des-Landes, Bure, ou encore pour la lutte contre l'immigration irrégulière. Depuis deux ans, je n'ai plus d'escadrons de renfort pour les missions de sécurité publique générale.