Intervention de Marta de Cidrac

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 8 février 2018 : 1ère réunion
Table ronde sur les mutilations sexuelles féminines

Photo de Marta de CidracMarta de Cidrac, co-rapporteure :

Merci, Madame la présidente.

Je souhaite revenir sur cette visite que la présidente nous a permis d'organiser au Women safe de Saint-Germain-en-Laye, lundi dernier. Dans ce lieu, nous avons rencontré des femmes qui ont vécu des violences, notamment des excisions. Nous nous sommes réunies autour d'un groupe de parole pour les entendre. Nous avons pu nous rendre compte que pour les victimes de mutilations, la chirurgie réparatrice initiée par le Docteur Foldès n'est qu'un aspect d'un processus de reconstruction qui ne peut qu'être long et complexe. D'autres accompagnements - psychologique, juridique - doivent aussi être mis en place. C'est le sens du Women Safe.

Pour certaines des femmes que nous avons rencontrées, c'est une nouvelle vie qui commence grâce à l'opération, une « renaissance ». Une jeune femme qui participait au groupe de parole auquel nous avons pu assister lundi disait que la date de son opération était sa « deuxième date de naissance ».

Mais pour d'autres victimes, plusieurs traumatismes peuvent s'ajouter à celui de l'excision : un mariage forcé (qui implique des viols répétés), des grossesses précoces, une rupture familiale, l'errance dans des territoires en guerre, l'émigration, puis le dénuement et l'isolement social et culturel dans un pays étranger...

Ces parcours soulignent la nécessité d'une prise en charge globale des femmes, avec pour la plupart la nécessité d'un accompagnement psychologique, qui peut prendre beaucoup de temps.

Ce qui frappe aussi, quand on écoute les femmes accueillies au Women Safe, c'est combien leurs témoignages forcent à l'humilité : personne ne peut inciter une victime de mutilation à se faire opérer, c'est la décision de la femme, et sa décision seule, qui est en jeu. Cela montre bien que pousser la porte d'un organisme comme Women Safe ne se réduit pas à une démarche médicale : c'est en fait le début d'un parcours qui engage toute une vie.

Une autre chose doit absolument être martelée : c'est la force et le courage qu'il faut à ces femmes pour parler de ce qu'elles ont subi, parce que cela touche au plus intime de leur personne, cela touche à leur identité de femme, de mère et de fille, et aussi parce que les personnes que nous avons en face de nous ne viennent pas de cultures où ces sujets peuvent être abordés facilement. Dans ce domaine, le non-dit est très présent.

Mais finalement, on s'aperçoit qu'il y a beaucoup de points communs entre ces victimes et les victimes des autres violences faites aux femmes (violences conjugales, violences sexuelles). Les auditions auxquelles nous procédons depuis la rentrée à la délégation l'illustrent chaque semaine. Parmi ces points communs, je citerai :

- le traumatisme profond qu'impliquent ces violences et leur effet profondément destructeur sur les victimes ;

- la difficulté de libérer la parole, a fortiori quand ces violences mettent en cause la responsabilité des proches ;

- la nécessité d'une prise en charge globale pour les victimes, médicale mais aussi psychologique, sociale et juridique.

Je vous remercie.

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