Intervention de Bernard Bacci

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 21 mars 2018 à 9h50
« adapter les règles de l'impôt sur les sociétés au nouveau contexte international et européen » : Audition conjointe de M. Grégory Abate sous-directeur de la fiscalité directe des entreprises à la direction de la législation fiscale M. Bernard Bacci directeur fiscal du groupe vivendi Mme Béatrice deShayes directrice fiscale du groupe lvmh M. Daniel Gutmann avocat associé du cabinet cms francis lefebvre avocats et de Mme Stéphanie Robert directeur de l'association française des entreprises privées afep

Bernard Bacci, directeur fiscal du groupe Vivendi :

Vivendi est actif dans la télévision payante et gratuite ainsi que dans la musique et les jeux en ligne : à la frontière entre l'ancien et le nouveau monde !

Le numérique a conduit les États à s'interroger sur la taxation des GAFA, qui se sont structurés de manière à éviter l'impôt. Pour nous, ce sont parfois des concurrents, et leur exemple peut inciter à s'attaquer à toutes les grandes entreprises, ce qui serait une erreur. La question de la localisation de la création de valeur concerne moins les entreprises que les États. Le projet BEPS n'apporte aucune réponse pour taxer l'économie numérique, mais il impose des obligations à tous.

Le CBCR éclairera les administrations fiscales, mais les pays qui ne sont pas dans l'OCDE détournent massivement cette procédure. En effet, les travaux de l'OCDE sont effectués par des pays ayant un système fiscal stable et contrôlé par le juge. Et ils profitent directement à des pays aux administrations fiscales naissantes et au système judiciaire malveillant envers les entreprises étrangères, qui entrent en compétition pour récupérer autant d'impôts que leurs voisins. En principe, le CBCR n'a pas à être communiqué aux administrations locales mais uniquement à l'administration dont on dépend ; mais en cas de contrôle, il est difficile de refuser de le remettre sous peine de se voir accuser d'obstruction.

Les entreprises françaises sont légalistes, ce qui les rend parfois vulnérables. Les États sont en compétition au travers de leurs politiques de compétitivité ; à peine sortis du G20, chacun met en place ses propres mesures.

La liste des pays et des territoires non coopératifs est établie au niveau de l'Union européenne. La première version de cette liste recensait une centaine de pays, ce qui était pour le moins étrange, car cela signifiait que la moitié des juridictions était au ban de l'autre moitié. En décembre 2017, la liste a été réduite à 17 pays. En janvier 2018, n'y figurent plus que 9 pays, sans doute ceux qui n'ont pas d'amis parmi la communauté internationale. Qu'en conclure sinon que l'entreprise est prisonnière des conflits diplomatiques entre les États ? Lorsque le législateur ne prend pas la peine de s'interroger sur les enjeux profonds de telle ou telle disposition, il prend le risque d'alimenter un régime défavorable aux entreprises françaises et in fine à la France.

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