Nous avons le plaisir d'entendre le directeur général de l'Office national des forêts, qui gère nos forêts publiques, c'est-à-dire à peu près 10 % du territoire hexagonal. Bien entendu, nous nous intéressons au devenir de l'ensemble de la forêt française, y compris celui de sa composante privée, qui est deux fois plus étendue mais, en moyenne, moins gérée et moins productive car plus morcelée et faiblement financée.
L'ONF traverse une période tendue. Vous en êtes parfaitement conscient puisqu'ici même, en 2015, au moment de votre désignation, vous évoquiez le défi des « crispations » internes à l'ONF et, plus généralement, des divisions de la filière bois. Face aux graves difficultés de l'Office, la Cour des comptes avait préconisé, en 2014, de couper plus de bois pour augmenter les recettes et de privilégier les recrutements de salariés de droit privé pour maitriser la dépense. Économiquement et socialement, où en sommes-nous aujourd'hui, bientôt trois ans après votre prise de fonction ?
La cohésion d'un organisme est une condition essentielle de son efficacité économique. C'est tout aussi vrai pour l'ensemble d'une filière. Ainsi, l'Allemagne, où semble régner un climat de confiance entre les opérateurs forestiers, produit deux fois plus de sciages que la France avec une forêt 50 % plus petite que la nôtre. Comparaison n'est pas raison car la forêt allemande est résineuse à 60 % - et donc bien adaptée à la demande industrielle - tandis que la forêt française est à 60% feuillue, ce qui correspond à des bois de qualité mais moins malléables pour l'industrie. De plus, la gestion forestière est plus systématique en Allemagne et, fait notable, les gestionnaires publics interviennent chez les propriétaires privés. Sur ces deux points - l'adaptation de notre filière bois à la demande et la coopération entre le public et le privé - quelle est votre stratégie et votre sentiment ?
Les parlementaires sont régulièrement alertés par des scieurs qui disent manquer d'approvisionnement en chênes : comment expliquez-vous ce paradoxe puisque notre forêt est excédentaire en feuillus et que nous importons surtout des résineux ?
Enfin, le Sénat a soutenu la création du fonds stratégique bois qui traduit l'idée d'une enveloppe globale et stable pour l'investissement et la replantation : il « suffirait » de 150 millions d'euros par an pour valoriser notre immense forêt et y créer des emplois. Or les financements publics restent modestes et éclatés : des sommes importantes sont placées sous la gouvernance du ministère de l'Écologie avec une incitation, que certains jugent excessive, à brûler le bois, ce qui n'est pas la meilleure manière de créer de la valeur ajoutée...