Intervention de Colonel Jean-Pierre Sobol

Commission d'enquête état des forces de sécurité intérieure — Réunion du 21 mars 2018 à 14h15
Table ronde d'associations de l'« entente gendarmerie »

Colonel Jean-Pierre Sobol, président de l'association nationale des Réservistes et des Sympathisants de la Gendarmerie :

Je suis un ancien réserviste issu de la société civile. Dans le cadre de mes fonctions, j'ai été amené à être en haut d'une pyramide de 1 365 personnels. J'ai transmis à la commission un certain nombre de chiffres. J'ai également apporté un exemplaire de la revue de notre association, laquelle comporte des témoignages de réservistes opérationnels et des entretiens avec le général en charge des ressources humaines.

Le commandement de la gendarmerie est particulièrement attentif à la question des suicides. Une chaîne d'informations a été mise en place pour prévenir les incidents de ce type.

Les contrats ESR (engagement à servir dans la réserve) représentent 30 000 personnels qui font des permanences sur leur week-end, et leur temps de vacances. Cela représente un million de jours d'activité en 2017. Dans 68% des cas, ils assurent des missions d'ordre et de sécurité publics. Les réservistes ont des états d'âme, motivés par les réductions budgétaires. En 2017, le budget était de 90 millions d'euros. La réserve vient de subir une réduction de 28 millions d'euros. C'est très dur pour nos réservistes qui souhaitent être utiles à l'intérêt général de s'entendre dire en fin d'année qu'ils ne peuvent pas être réemployés l'année suivante par faute de moyens.

Dans le cadre des travaux pour notre revue, nous avons abordé la question de la réponse pénale. Celle-ci est vue comme non adaptée à la délinquance et à la criminalité.

Capitaine Renaud Ramillon-Defforges, président de la fédération nationale des réservistes opérationnels et citoyens de la Gendarmerie Nationale. - Le gendarme s'insère dans une réalité territoriale et sociale, à l'heure de la France périphérique, urbaine et périurbaine pour reprendre la classification de Christophe Guilluy. On constate trois grandes tendances : tout d'abord les consommateurs de sécurité, ce que certains appellent les hédonistes sécuritaires. Ensuite, dans beaucoup de territoires, la gendarmerie nationale incarne le lien entre ces derniers et l'État. Enfin, il y a des zones que certains appellent de non-droit, ou plutôt d'un droit appliqué qui n'est pas celui de l'État républicain.

De manière générale, on constate un phénomène de remise en cause de l'autorité de l'État. À titre d'exemple, lors des contrôles routiers, une réaction régulière est de dire : « pourquoi moi, et pas la voiture qui vient de passer » ou encore « pourquoi moi, alors que les délinquants ne sont pas inquiétés ».

La gendarmerie est marquée par la loyauté, mais aussi par l'innovation, venant du terrain. Ainsi, sur proposition d'unités de gendarmerie a été développée la main courante gendarmerie. De même, la brigade NUMA est issue de réflexions de terrain, tout comme l'application MINOTAUR, venant du sud-ouest de la France, qui permet aux réservistes de poser en temps réel leurs disponibilités.

Pour moi, il est important d'avoir une vision globale de la sécurité, et de s'interroger et dialoguer sur la place de la gendarmerie, de la répartition gendarmerie nationale-police nationale, mais aussi avec la police municipale et les sociétés de sécurité privée. Une réflexion doit également être menée avec la justice. Nous organisons le 3 mai prochain une rencontre entre les élus, la gendarmerie nationale et la justice. Dans le cadre d'une réunion de préparation, un officier adjoint de commandement d'un groupement rencontrait pour la première fois le substitut du procureur de son territoire. On constate que les acteurs se connaissent mal.

Enfin, comme pour beaucoup de fonctionnaires, se pose la question du sens de l'action de l'État. Rien n'est pire pour un gendarme que de ne pas pouvoir faire quelque chose car il n'a pas les moyens de le faire. Il faut également réfléchir à la philosophie du code pénal et de procédure pénale. Quel doit être le but de l'allégement de ces codes ? Toute réforme doit réussir à conserver l'équilibre entre d'une part les libertés et d'autre part les outils nécessaires pour retrouver les auteurs des infractions.

Un point important de malaise pour les réservistes de la gendarmerie nationale se situe dans la protection sociale. Le réserviste, une fois qu'il a fini sa mission, redevient un civil comme un autre, et n'est plus protégé par l'armée. Se pose alors la question de la prise en charge d'un réserviste lors d'un accident. La gendarmerie nationale a fait beaucoup de choses, notamment dans le traitement des dossiers. Mais des problèmes demeurent, dans les dossiers traités par les SGAMI, en raison de budgets insuffisants pour payer les indemnités, ou encore de personnels SGAMI insuffisamment formés pour prendre en compte ces situations. Les délais de traitement sont alors très longs.

Enfin pour les équipements, les réservistes sont équipés à partir des dotations en équipement des gendarmeries.

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