Intervention de Patricia Morhet-Richaud

Réunion du 3 avril 2018 à 14h30
Constitutionnalisation de l'ivg — Débat organisé à la demande du groupe communiste républicain citoyen et écologiste

Photo de Patricia Morhet-RichaudPatricia Morhet-Richaud :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à la demande de nos collègues du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, un débat est organisé cet après-midi sur la constitutionnalisation de l’interruption volontaire de grossesse.

Ce débat fait suite au dépôt, en mai 2017, d’une proposition de loi constitutionnelle visant à inscrire le droit à l’interruption volontaire de grossesse dans la Constitution.

C’est l’occasion de rappeler que le droit à l’IVG est inscrit dans la loi, à l’article L. 2212-1 du code de la santé publique depuis la promulgation de la loi Veil le 11 janvier 1975. Cet article grave dans le marbre le principe selon lequel les femmes sont libres de disposer de leur corps.

Bien que l’avortement soit un droit et que, à ce titre, il doive être respecté, c’est un sujet de préoccupation qui demeure d’actualité. Souvenez-vous qu’il a été question, en 2017, dans cet hémicycle, d’une proposition de loi relative à l’extension du délit l’entrave à l’interruption volontaire de grossesse.

C’est vrai que c’est un droit, chez nous, en France. Mais il existe encore aujourd’hui, à cet égard, une grande disparité dans le monde. Ainsi, en Europe, nos voisins irlandais organisent prochainement un référendum pour abroger ou non le huitième amendement de la Constitution, lequel interdit et condamne l’avortement. En Argentine, un projet de loi légalisant l’avortement a entraîné, depuis le 7 mars dernier, un vaste mouvement protestataire, avec parfois des manifestations d’une extrême violence. L’interruption volontaire de grossesse constitue par conséquent un enjeu électoral. En Espagne, en 2014, sa remise en cause a pu constituer un argument pour certains partis politiques.

Est-ce une raison suffisante pour envisager aujourd’hui de modifier l’article 34 de la Constitution française, en y ajoutant un alinéa supplémentaire ? L’inscription de ce droit dans la Constitution, pacte fondamental qui unit toutes les Françaises et tous les Français, correspond-elle à une nécessité juridique impérieuse ? Pour consolider le droit à l’interruption volontaire de grossesse et déjouer sa remise en cause, je crois pour ma part qu’il existe d’autres moyens.

Aucun acte médical ni aucune prise médicamenteuse ne sont sans conséquence sur, d’une part, l’organisme et, d’autre part, le psychisme de la femme qui subit un avortement. C’est pourquoi l’IVG ne doit pas être banalisée ou sanctuarisée. Elle doit rester du domaine de l’exception. La loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes ayant supprimé la notion de détresse pour en bénéficier, il ne faudrait pas que cet acte soit considéré comme une méthode contraceptive.

Vous le savez, mes chers collègues, les écarts entre les régions perdurent. Les recours à l’IVG peuvent varier du simple au double : 10 IVG pour 1 000 femmes en Pays de la Loire, 20 IVG pour 1 000 femmes en Provence-Alpes-Côte d’Azur, et plus de 25 IVG pour 1 000 femmes dans les départements et régions d’outre-mer.

Même si l’indice conjoncturel d’avortement demeure stable depuis près de quinze ans, il n’a pas pour autant diminué. Ainsi, 211 900 IVG ont été pratiquées en France en 2016.

Vous l’avez compris, je suis très réservée s’agissant de l’inscription de l’interruption volontaire de grossesse dans la Constitution. En revanche, je préconise que nous soyons beaucoup plus offensifs en matière de prévention, d’éducation et d’information dans ce domaine.

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