Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, je tiens à saluer le travail fait par les auteurs de la proposition de loi, ainsi que celui conduit par Mme la rapporteur.
Il y a un peu plus d’un an, à cette même tribune, je défendais au nom du groupe socialiste et républicain, et avec le groupe écologiste, un texte de portée universelle : la proposition de loi visant à la mise en œuvre effective du droit à l’eau potable et à l’assainissement. Nous étions contraints de déplorer, comme Ronan Dantec vient de le rappeler à l’instant, l’inexplicable attitude de blocage de la majorité sénatoriale, qui a alors empêché l’inscription de ce droit d’accès à l’eau pour tous dans la Constitution.
Cinq ans après l’entrée en vigueur de la loi Brottes du 15 avril 2013 portant diverses dispositions sur la tarification de l’eau et introduisant, pour les collectivités locales qui le souhaitent, la possibilité d’une expérimentation d’une tarification sociale de l’eau durant cinq années, on ne peut que se féliciter de l’examen de cette proposition de loi visant à proroger l’expérimentation de la tarification sociale de l’eau. Ce texte vise en effet à rendre l’eau accessible dans des conditions économiques acceptables pour tous.
Élément indispensable à la dignité humaine, l’eau ou, plus précisément, le droit d’accès à l’eau potable est loin d’être une réalité pour tous, tant au-delà de nos frontières que sur l’ensemble de notre territoire. Un million de ménages ont accès à l’eau en payant un prix considéré comme excessif par rapport à leurs revenus. Plus de 100 000 personnes ne bénéficient pas d’un accès direct à l’eau et à l’assainissement : je pense plus précisément aux populations des squats. Il y a là une urgence sociale !
Une cinquantaine de collectivités territoriales ont choisi d’expérimenter les dispositifs proposés. La lecture du rapport d’étape établi par le Comité national de l’eau permet de constater la variété des dispositifs mis en place par les collectivités, qui ont le choix entre le versement automatique d’aides ou l’instauration d’une modulation tarifaire par la définition de tarifs tenant compte de la composition ou des revenus du foyer et pouvant ainsi inclure une première tranche de consommation gratuite. Cette gratuité avait elle-même été expérimentée à Libourne par le maire de l’époque, Gilbert Mitterrand.
La présentation effectuée par les collectivités locales qui ont expérimenté cette tarification sociale de l’eau révèle le souci d’une maîtrise des coûts de gestion, qui est à considérer par rapport à l’efficacité des dispositifs et qui doit être compatible avec le budget qu’elles consacrent à l’eau et l’assainissement.
Elle montre également l’importance du travail fait en amont avec les organismes gestionnaires comme la CAF ou la CPAM pour la transmission des données individuelles, la nécessité d’un travail de sensibilisation avec les délégataires et les bailleurs sociaux, sans oublier une sensibilisation des consommateurs en faveur d’une utilisation économe de l’eau, ce qui constitue l’un des moyens les plus efficaces pour limiter le poids de la facture d’eau dans les foyers.
Les collectivités locales qui se sont lancées dans cette expérimentation cherchent à simplifier les procédures pour accroître l’efficacité des dispositifs. Il faut souhaiter qu’un plus grand nombre de collectivités s’engage. La poursuite de l’expérimentation devrait en tout état de cause faciliter l’échange d’expériences et favoriser la nécessaire évaluation de la viabilité et de l’efficacité de la démarche.
Prolonger ces dispositifs serait positif. Il faut toutefois déplorer le fait que ceux-ci sont territorialisés et expérimentaux. Il ne faudrait pas qu’un nombre toujours aussi élevé de ménages « galère » encore dans trois ans pour payer sa facture d’eau ! N’oublions pas, comme le répétait Danièle Mitterrand, que « l’eau, c’est la vie ». Ce droit d’accès à l’eau potable ne saurait être réduit à une aide facultative et expérimentale.
Avec mes collègues du groupe socialiste et républicain, je voterai ce texte en vous demandant de poursuivre notre réflexion et notre inlassable combat pour la nécessaire inscription du droit à l’eau dans la Constitution ! D’autres États comme la Slovénie ou le Burkina Faso l’ont fait bien avant nous !