Intervention de Christine Lavarde

Réunion du 5 avril 2018 à 15h00
Élection des conseillers métropolitains — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Christine LavardeChristine Lavarde :

Madame la présidente, madame la ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, à ce stade de nos échanges, beaucoup a déjà été dit.

Si supprimer l’article 54 de la loi MAPTAM est effectivement avant tout un acte symbolique, celui-ci n’en a pas moins le mérite de rouvrir le débat sur les métropoles et l’élection des conseillers métropolitains.

Je remarque tout d’abord que les métropoles sont de nature très diverse. Comment comparer les onze métropoles de droit commun correspondant à des EPCI à fiscalité propre de 400 000 habitants dans une aire urbaine de 650 000 habitants – les trois dernières, Montpellier, Rouen et Nancy, sont nées de la volonté des ensembles intercommunaux préexistants – à la collectivité territoriale au statut particulier de Lyon, aux deux métropoles à statut particulier du Grand Paris et d’Aix-Marseille-Provence, ou encore aux sept dernières métropoles de taille plus modeste créées le 1er janvier 2018 ?

Le débat sur les mécanismes de désignation des conseillers métropolitains doit, me semble-t-il, tenir compte de cette différence fondamentale. Ainsi, Lyon, devenu une vraie collectivité territoriale, ne peut être traité de la même manière que les jeunes métropoles qui ont vu le jour en 2018.

Sophie Joissains nous a décrit le fonctionnement, voire les dysfonctionnements, de la métropole d’Aix-Marseille-Provence. En tant qu’élue de la métropole du Grand Paris au titre de mon mandat à Boulogne-Billancourt et dans l’établissement public territorial Grand Paris Seine Ouest, je vous parlerai de la métropole du Grand Paris.

Je le rappelle, cette « métropole » a été bâtie contre l’avis des maires et des élus locaux, qui se sont prononcés à deux reprises contre les textes MAPTAM et NOTRe au sein de la mission de préfiguration du Grand Paris : à plus de 75 % en octobre 2013 et à 94 % en octobre 2014.

J’ai bien entendu les propos d’Alain Richard, qui, reprenant les intentions du Président de la République, a évoqué des évolutions volontaires pour six ou sept grandes métropoles.

Aujourd’hui, évoquer la métropole du Grand Paris, c’est faire une sorte de « voyage en Absurdie », sur le plan institutionnel comme sur le plan financier. Elle n’exerce pas de véritables compétences opérationnelles, mais suscite 3, 4 milliards d’euros de flux financiers, pour un budget primitif pour 2018 de 29, 3 millions d’euros après retraitement des flux entre la métropole et les communes, soit moins de 4, 3 euros par habitant pour fonctionner. L’épargne brute de cet ensemble de plus de 7 millions d’habitants est de seulement 5 millions d’euros.

Cela pourrait prêter à sourire si nous n’étions pas dans un contexte de crise, avec une baisse de l’investissement local « sans précédent », selon un récent rapport du groupe BPCE… Faute de projet, la métropole du Grand Paris a investi seulement 16 millions d’euros en 2017. Les territoires, qui ont dû transférer une partie de leur fiscalité économique à la métropole, auraient su mobiliser utilement la croissance de la CVAE du territoire francilien au bénéfice de l’économie nationale. Privés de leurs moyens financiers, ils ont dû geler des investissements programmés et proches des citoyens.

En l’état, une élection au suffrage universel direct des conseillers métropolitains du Grand Paris, détachée des communes, serait une catastrophe, sauf à vouloir en faire une sorte de « super-département » intercalé entre les blocs communaux et la région. Une nouvelle couche supplémentaire à un millefeuille déjà bien indigeste…

Madame la ministre, alors sénatrice du Loir-et-Cher, vous aviez justement fait remarquer, dans le cadre de l’examen d’un amendement déposé lors de la seconde lecture de la loi MAPTAM, qu’élire les conseillers métropolitains au suffrage universel direct reviendrait, de fait, à créer une nouvelle collectivité territoriale.

Par ailleurs, quelle cohérence y aurait-il à définir aujourd’hui les modalités d’élection d’élus dont on ne connaît toujours pas les attributions dans les prochaines années ?

Le Président de la République, qui a déjà repoussé à plusieurs reprises ses annonces sur la réforme du Grand Paris, prendra-t-il conscience que, tant qu’il ne se sera pas prononcé, l’incertitude et le flou institutionnel continueront de régner, rendant impossible toute action et toute gestion saine de nos collectivités ?

Le mode d’élection actuel des conseillers métropolitains par fléchage permet de maintenir un lien de proximité entre les citoyens, les élus locaux et leurs représentants au sein de l’échelon métropolitain. Pour être efficace, la construction des métropoles doit se faire au service des communes qui la composent, et non contre celles-ci.

Telles sont les raisons pour lesquelles je voterai en faveur de cette proposition de loi.

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