Il est vrai que les internautes ne se comportent pas de la même façon selon qu'ils sont identifiables ou anonymes. L'exemple estonien est fascinant, mais il n'est pas reproductible dans un pays de 66 millions d'habitants. De plus, les outils d'anonymisation sont utilisés aussi bien dans nos démocraties qu'en Chine, par les dissidents rétifs à ce que les autorités contrôlent les déplacements de leurs 1,3 milliard d'habitants... Ce sont les mêmes techniques cryptographiques qui couvrent parfois des actes délictueux ou terroristes sous nos latitudes et qui protègent la liberté sous d'autres. Il n`existe donc pas de one size fits all, de taille unique, en matière de régulation. Lutter contre les délits de manipulation de l'opinion par achat massif de petites mains actives sur les réseaux sociaux dans des pays à bas coût de main d'oeuvre est aussi un combat géopolitique, qu'il faut mener à l'échelle européenne. Dans la gouvernance d'Internet, les parties prenantes sont en principe placées sur un pied d'égalité, mais en cas de crise de confiance systémique - c'est désormais le cas puisque l'on soupçonne à présent des officines de Cambridge Analytica d'avoir aussi influencé des scrutins colombien, argentin ou mexicain -, nous devons cesser de nous payer de mots et formuler des exigences de transparence plus strictes.