Intervention de Mireille Jouve

Réunion du 3 avril 2018 à 15h00
Élection des conseillers métropolitains — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Mireille JouveMireille Jouve :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi que plusieurs de mes collègues et moi-même souhaitons soumettre à votre examen vise à abroger l’article 54 de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, ou loi MAPTAM.

Cet article prévoit que les conseils métropolitains feront l’objet, lors de leur prochain renouvellement, d’une élection au suffrage universel direct selon des modalités fixées par une loi promulguée avant le 1er janvier 2019.

S’il n’entraîne aucune obligation à l’égard du législateur, l’article est de nature à créer une incertitude parmi les élus locaux concernés. Sa suppression aurait indéniablement le mérite d’apporter de la clarté, de la stabilité et de rappeler l’attachement du Sénat à ce que la commune demeure la cellule de base de notre démocratie de proximité.

En effet, lors des débats ayant précédé l’adoption de la loi MAPTAM, de la loi NOTRe portant nouvelle organisation territoriale de la République ou de la loi relative au statut de Paris, le Sénat s’est prononcé avec constance en faveur du maintien de l’unicité du scrutin pour l’élection des exécutifs des communes, des établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, et des métropoles.

À l’exception du Grand Lyon, toutes les métropoles françaises demeurent, à ce jour, des établissements publics de coopération intercommunale.

Admettre une élection au suffrage universel direct des conseils métropolitains dans le cadre d’un scrutin distinct reviendrait inexorablement à séparer communes et métropoles et à transformer ces dernières en collectivités territoriales. Or l’intercommunalité a été pensée et conçue comme une émanation des communes dont la vocation première est la mutualisation des compétences et la création d’une gouvernance de projets. Elle repose aussi sur le principe de subsidiarité.

À cet égard, que restera-t-il aux communes métropolitaines, une fois qu’elles auront transféré leurs compétences, coopéré de bonne foi à la gouvernance avant de voir le lien qui les unit à la métropole définitivement coupé, et cela, cruel paradoxe, alors que les élus municipaux continueront d’être interpellés par leurs administrés ?

La mort annoncée de ces communes, nous la refusons ! L’échelon communal demeure, j’en suis convaincue, la clef de voûte de la cathédrale républicaine.

Je reconnais volontiers, mes chers collègues, que les détracteurs les plus assidus du socle communal ne siègent pas au sein de cet hémicycle, mais la rengaine, hors de ces murs, est souvent la même.

« Comment voulez-vous gouverner un pays qui compte 258 variétés de fromages ? » demandait le général de Gaulle. À son imitation, certains considèrent que nos communes, du fait de leur émiettement, représentent un obstacle qu’il faudrait impérieusement lever pour administrer efficacement notre démocratie de proximité.

La France comptait 38 000 communes en 1789. Elles sont environ 35 000 aujourd’hui. Depuis plus de deux siècles, la République semble s’en être accommodée.

Ce qui peut apparaître à certains comme une tare ineffaçable est aussi une force, celle de la proximité, celle du lien politique et social qui unit les Français à leur maire et à leurs élus municipaux. Par les temps qui courent, cette relation est plus que jamais précieuse pour maintenir notre cohésion nationale.

Nous comprenons les attentes qui peuvent conduire certains présidents d’exécutifs métropolitains à réclamer un scrutin distinct de celui des communes, et donc détaché de l’élection des maires. Comme avait coutume de dire Clemenceau, « pour prendre une décision, il faut être un nombre impair de personnes, et trois, c’est déjà trop ».

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