Intervention de Bernard Cazeneuve

Commission d'enquête état des forces de sécurité intérieure — Réunion du 3 avril 2018 à 17h30
Audition de M. Bernard Cazeneuve ancien premier ministre

Bernard Cazeneuve, ancien Premier ministre :

Non parce que le renseignement territorial (RT) et le renseignement intérieur ne font pas le même travail : le renseignement territorial doit travailler en très étroite liaison avec la sécurité publique parce qu'il détecte des signaux faibles, qui peuvent révéler des risques graves, et la DGSI prend le relais. Le travail réalisé entre le RT et la sécurité publique ou parfois entre le RT et la gendarmerie peut être extrêmement positif - Le Monde a publié la liste des attentats déjoués depuis plusieurs années.

La sécurité intérieure, c'est autre chose. La DGSI, c'est le haut du spectre, le suivi des individus les plus dangereux, qui sont souvent engagés dans des activités à caractère terroriste ; on l'a vu d'ailleurs avec l'attentat de novembre 2015 - ceux qui nous ont frappés avaient franchi la frontière extérieure de l'Union européenne et étaient en lien direct avec des individus qui donnaient des ordres à partir de Raqqa.

Troisièmement, une loi sur le renseignement, une loi structurelle dans son contenu : les services de renseignement du premier et du second cercles ont été dotés des moyens technologiques d'intervention. Vous vous souvenez des débats que nous avons eus sur les algorithmes, nous avons mis en oeuvre des techniques de renseignement pour suivre des acteurs terroristes ainsi que des dispositifs de contrôle, en transformant la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS) en Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR). Par ailleurs, nous avons mis en place un contrôle juridictionnel beaucoup plus important, qui constitue une véritable réforme structurelle.

Quand vous devez adapter les services de renseignement à la loi Renseignement, c'est une révolution pour ces services. D'autres réformes étaient-elles nécessaires ? Sans doute. Mais était-il opportun de les faire toutes à la fois, alors qu'ils étaient confrontés aux attentats, aux filières terroristes ? Nous avons décidé de conduire ces réformes par étapes. Et c'est ainsi qu'il faut procéder, sauf à mettre les services sous une pression telle qu'ils finissent par se détourner de l'objectif pour lequel ils ont été créés, c'est-à-dire la mise hors d'état de nuire d'individus.

Faut-il poursuivre les réformes ? Oui, monsieur le sénateur. D'ailleurs, le Président de la République a décidé de mettre en place une task force autour de lui pour mieux analyser les phénomènes et mieux anticiper les risques. Cette réforme importante s'inscrit dans la continuité des réformes conduites par ses prédécesseurs, notamment le président Sarkozy, qui, aux termes du Livre blanc, a décidé d'instaurer le Conseil national du renseignement (CNR).

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