Intervention de Adeline Hazan

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 11 avril 2018 à 9h05
Audition de Mme Adeline Hazan contrôleure générale des lieux de privation de liberté

Adeline Hazan, contrôleure générale des lieux de privation de liberté :

Je suis extrêmement attachée aux échanges avec le Parlement. Lors de la fusion de diverses entités pour ériger le Défenseur des droits en 2011, l'Assemblée nationale y avait intégré le contrôleur général des lieux de privation de liberté au processus. Fort heureusement, le Sénat nous a permis de conserver notre indépendance ; je ne l'oublie pas. Nous n'intervenons en effet pas selon la même philosophie : le Défenseur des droits est un médiateur entre les citoyens et l'administration, tandis que nous sommes nés de la recommandation de l'Organisation des nations unies (ONU) de créer un mécanisme national de prévention. De fait, nous ne réglons pas, sauf indirectement, des situations individuelles mais constatons des manquements pour qu'ils ne se renouvellent pas. À cet effet, après une visite, nous adressons un rapport complet à l'établissement assorti, le cas échéant, de recommandations. Une fois sa réponse reçue, nous envoyons le rapport au ministre de tutelle avant de le rendre public. La procédure dure un peu moins d'une année. Lorsqu'une atteinte grave est constatée, comme à Bourg-en-Bresse ou à Saint-Etienne, nous envoyons en urgence une recommandation au ministre concerné. Nous disposons, pour mener à bien nos missions, de quarante contrôleurs, dont vingt seulement à temps plein, qui passent environ quinze jours par mois en visite de une à deux semaines en immersion totale. Le secret professionnel ne peut leur être opposé. Depuis la loi précitée de 2014, les dossiers médicaux eux-mêmes peuvent être consultés par un contrôleur dès lors qu'il s'agit d'un médecin. Nos équipes sont très occupées mais, en toute franchise, nos moyens sont globalement suffisants.

La loi du 30 octobre 2007 qui nous a institués a limité notre compétence aux lieux privatifs de liberté sur décision de l'autorité publique et aux établissements psychiatriques pour leur activité relative à l'hospitalisation d'office. Les Ehpad en sont donc exclus. Mon prédécesseur, Jean-Marie Delarue, souhaitait effectivement les intégrer à notre périmètre d'intervention. Je n'y suis pour ma part pas favorable car l'hébergement des personnes âgées dans ces établissements ne relève pas d'une contrainte de même nature, sans méconnaître le fait que les agences régionales de santé (ARS) et les conseils départementaux ne s'en préoccupent pas suffisamment. Il conviendrait à mon sens plutôt d'installer une autorité indépendante en charge du contrôle des Ehpad. Si d'aventure cette mission nous était confiée et dans la mesure où la France compte 7 000 Ehpad, nos moyens devraient évidemment être augmentés.

En tant que contrôleure générale des lieux de privation de liberté, je suis particulièrement choquée de la situation découverte dans certains hôpitaux psychiatriques. Pensez qu'à Bourg-en-Bresse comme à Saint-Etienne, la Haute autorité de santé (HAS) avait réalisé un contrôle quelques semaines avant notre visite sans constater de manquement ! Je vais prochainement m'en ouvrir à la ministre de la santé. Nous nous sommes ainsi rendus à Saint-Etienne le 15 janvier dernier ; or, en novembre 2017, sept personnes de la HAS n'avaient vu aucun obstacle à la certification des soins réalisés dans l'établissement... Cela étant, depuis notre passage, l'hôpital s'est montré particulièrement réactif : le directeur a fait cesser la pratique des entraves aux brancards dans le service des urgences et a ouvert des lits supplémentaires en psychiatrie. Qui veut, peut donc...

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