Intervention de Adeline Hazan

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 11 avril 2018 à 9h05
Audition de Mme Adeline Hazan contrôleure générale des lieux de privation de liberté

Adeline Hazan, contrôleure générale des lieux de privation de liberté :

Monsieur Bonnecarrère, l'article premier de la loi du 30 octobre 2007 n'est pas exclusif de contacts avec le Parlement. Je suis d'ailleurs souvent invitée à donner mon avis sur un projet de loi. Je suis, par exemple, entendue cette semaine à trois reprises par le Parlement : outre notre rencontre de ce matin, je m'exprimerai demain devant la commission d'enquête sénatoriale sur l'organisation et les moyens des services de l'État pour faire face à l'évolution de la menace terroriste après la chute de l'État islamique et, à l'Assemblée nationale, sur la problématique des fouilles en prison. Le Parlement semble donc se préoccuper de mon avis, de même, d'ailleurs, que le président de la République et le Premier ministre. Je ne crois en conséquence pas outrepasser ma mission.

Je ne puis affirmer, monsieur Pillet, avoir déjà été confrontée à des cas d'hospitalisation d'office abusive. Il est en revanche exact que leur nombre croît en raison de troubles mentaux de plus en plus fréquents et du manque de structures de prise en charge en amont, à l'instar des centres médico-psychologiques (CMP) qui manquent cruellement de moyens. En outre, la réforme portée par la loi du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge, en créant une nouvelle forme d'hospitalisation sans consentement « en cas de péril imminent », a contribué à la multiplication des hospitalisations forcées. Auparavant, les familles étaient contactées systématiquement et pouvaient parfois convaincre la personne malade de se faire soigner librement.

Monsieur Marc, l'augmentation du nombre de mineurs détenus est davantage la conséquence d'une plus grande sévérité des tribunaux, même si l'on observe un rajeunissement des jeunes délinquants. Par ailleurs, l'absence de prise en charge adaptée des mineurs isolés par les départements conduit certains magistrats à voir dans la détention une solution à leur situation. Quant à la création annoncée de 7 000 nouvelles places de prison, je ne la juge pas crédible, sans compter que le taux de remplissage des prisons ne diminue pas en proportion de l'ouverture de nouvelles places. C'est un cercle vicieux ! Il y a trente ans, la France comptait 30 000 places. Elle en dispose désormais de 60 000 alors que la surpopulation n'a jamais été si élevée. L'incarcération représente, en quelque sorte, une solution de facilité pour des magistrats qui ne disposent pas, dans les services pénitentiaires d'insertion et de probation, des moyens d'apporter un éclairage suffisant sur la personnalité de l'accusé en vue de proposer une peine adaptée à chacun.

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