Intervention de Jean-Yves Le Drian

Réunion du 16 avril 2018 à 17h00
Intervention des forces armées françaises en syrie — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Jean-Yves Le Drian :

… que ce sont les habitants de Douma qui se seraient gazés eux-mêmes ! Les groupes armés auraient organisé en interne leur propre sacrifice pour mettre en difficulté le régime. J’ai même entendu par les mêmes manipulateurs que ce sont les services secrets occidentaux qui ont tout organisé. À force de manipuler, on finit par être victime soi-même de ces manipulations. Il faut donc être très vigilant sur ces cycles de manipulation, qui ne répondent qu’à un seul objectif : instiller le doute et diviser nos concitoyens.

Je terminerai mon propos en évoquant la question centrale du moment parce que beaucoup l’ont abordée : et maintenant que faire ?

Je crois l’avoir dit dans mon propos initial, nous avons un socle d’actions possibles puisque trois résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies ont toutes été adoptées à l’unanimité : une concerne l’utilisation des armes chimiques, une autre, l’humanitaire et la troisième, plus ancienne, la résolution 2254, le règlement politique.

Sur les armes chimiques, la résolution 2118 comprend tous les éléments pour mettre en œuvre le démantèlement définitif de la présence d’outils chimiques sur le territoire de la Syrie. Il convient de mettre en œuvre ce dispositif, et l’outil capable de le faire, c’est l’OIAC : mandatons-la pour cela !

Concernant l’humanitaire, il y a un peu plus d’un mois, une résolution a été adoptée à l’unanimité pour réclamer le cessez-le-feu immédiat et pour permettre l’accès de l’aide humanitaire à l’ensemble des populations, quelle que soit leur origine. Elle a été adoptée, mais elle n’a pas été mise en œuvre par ceux-là mêmes qui l’avaient adoptée : il faut la mettre en œuvre !

Enfin, la résolution 2254 concerne la manière de régler le problème politique, en prévoyant un agenda possible, une feuille de route qui permettrait à la fois une transition ainsi qu’un retour à la paix et à la sérénité dans un pays qui a tant souffert.

Il est aujourd’hui possible de mettre en œuvre cette résolution en réactivant le processus de Genève. Certains ont tenté – plusieurs d’entre vous l’ont relevé – de trouver une autre solution, avec le processus d’Astana, puis le processus de Sotchi. Mais même ce dernier processus, engagé par le président Poutine avec le président Rohani et le président Erdogan, n’a pas abouti parce que le comité constitutionnel qu’ils voulaient instaurer pour faire en sorte qu’il y ait une sortie politique sur le territoire syrien a même été refusé par Bachar al-Assad.

Il nous faut maintenant regrouper les trois résolutions qui constituent le socle de ce qui peut être demain la sortie digne, humaine d’une situation dramatique. C’est pourquoi la France a déposé hier devant le Conseil de sécurité une nouvelle résolution qui regroupe l’ensemble de ces résolutions antérieures, faisant constater aux uns et aux autres que ces dernières avaient été adoptées à l’unanimité et proposant que ce soit le point de départ d’une nouvelle étape, qui permettrait d’aboutir à un règlement pacifique de la situation.

La France assume donc ses responsabilités : elle intervient en refusant l’impunité de l’utilisation des armes chimiques et en faisant en sorte que l’aide humanitaire puisse reprendre, afin que le cessez-le-feu soit un fait et que le processus politique puisse se mettre en œuvre. C’est l’honneur de la France, la voix de la France, monsieur le président Retailleau, que de dire cela et de le dire au Sénat et à l’Assemblée nationale, dans nos assemblées démocratiques. Nous avons voulu mettre un terme à l’horreur chimique qui frappe depuis trop longtemps la population syrienne. Nous avons en mémoire les massacres chimiques intervenus sur des champs de bataille antérieurs, ce qui renforce encore notre responsabilité.

Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons fait notre devoir pour que le droit international cesse d’être bafoué et pour ne plus revoir les images insoutenables de Douma le 7 avril dernier.

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