Oui, les occupants ont été évacués...
Cette position est d'autant plus étonnante que l'arrêté d'interdiction d'habitation de 2014 mentionne un péril grave et imminent pour la sécurité des personnes et des biens, considérant la probable survenue de perturbations météorologiques exceptionnelles de nature à accentuer l'érosion dunaire devant le Signal et à entraîner une submersion marine.
Selon l'Observatoire de la côte d'Aquitaine, le trait de côte recule de 2,5 mètres en Gironde chaque année et de 1,7 mètre dans les Landes. Des perturbations météorologiques exceptionnelles pourraient encore amplifier ce phénomène d'érosion dunaire dans des proportions importantes !
Dans le cas du Signal, néanmoins, le recul du trait de côte est de 5 à 7 mètres par an en moyenne, accentué notamment par la présence d'une digue à proximité, qui protège le quartier de l'Amélie à Soulac-sur-Mer et qui a tendance à accélérer les courants et à empêcher le sable de se déposer.
La dimension humaine du sujet est essentielle et insuffisamment relevée dans le débat public. On a entendu beaucoup de choses sur les propriétaires du Signal : ils seraient nantis, privilégiés et devraient assumer sans se plaindre les conséquences de leur désir de vivre au bord de l'eau... Je souhaiterais couper court à ces représentations.
D'abord, parce que la majorité d'entre eux sont des personnes de condition modeste, éprouvées moralement et physiquement par la longueur des procédures et l'absence de réponse. Certains ont investi toutes leurs économies et doivent, en plus, continuer à rembourser leurs dettes jusqu'en 2020, en 2025 ou en 2030.
Les propriétaires ont dû se reloger et acquitter un loyer ; ils continuent d'assumer les frais de syndic de copropriété, les assurances et une procédure longue et coûteuse pour se défendre : 100 000 euros de frais d'avocat depuis 2012, d'après leurs représentants.
Depuis quatre ans, date de l'évacuation, 11 propriétaires sont décédés. La question des successions est d'ailleurs apparue comme un nouveau problème pour leurs descendants, qui sont en contact avec l'administration fiscale pour estimer la valeur de la transmission...
L'immeuble est dans un état piteux. Il a été vandalisé et occupé de façon irrégulière en dépit de nombreuses plaintes des propriétaires.
Enfin, ce dossier a un caractère exceptionnel. Si le recul du trait de côte s'impose comme un phénomène commun à de nombreux territoires et s'il nécessite une approche intégrée et globale, sans doute davantage dans une logique d'acquisition que d'indemnisation, le cas du Signal reste très spécifique. Cette affaire est injuste et inédite. Elle a trop duré et une réponse exceptionnelle, ad hoc, s'impose pour traiter un problème lui-même exceptionnel.
Si nous sommes d'accord sur la nécessité de régler le problème de l'indemnisation et de la propriété de l'immeuble, le Gouvernement doit maintenant prendre ses responsabilités.
Nous devrons également éviter qu'une telle situation se reproduise, c'est pourquoi il est fondamental d'inscrire rapidement dans nos textes une obligation d'information préalable à l'acquisition d'un bien proche du rivage pour que les futurs propriétaires de ce type de bien aient pleinement conscience du risque et des conséquences du recul du trait de côte.
Un mot, enfin, concernant l'attitude du maire de Soulac-sur-Mer. Les auditions ont révélé que tant sa mobilisation que son écoute ont été insuffisantes pour les propriétaires. La protection de l'immeuble demeure également perfectible, alors même que la commune pourrait voir sa responsabilité engagée en cas d'accident.
J'attire votre attention sur le fait qu'un amendement du Gouvernement serait nécessaire pour établir clairement un transfert de propriété. En l'état, le dispositif permettra uniquement d'indemniser les propriétaires, mais les charges de démolition, de désamiantage ou autres incomberont légalement aux propriétaires. Il conviendrait donc d'amender légèrement la rédaction du texte pour prévoir explicitement que le fonds Barnier « finance l'acquisition par l'État » de l'immeuble. L'article 40 de la Constitution nous interdit malheureusement de déposer nous-mêmes cet amendement. J'espère sincèrement que nous pourrons trouver collectivement une solution qui apportera une réponse rapide aux copropriétaires. Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite à adopter le présent texte sans modification.