Si l'on s'en tient aux mutations entendues au sens de migrations ou mobilités des hauts fonctionnaires, nous disposons déjà d'une étude de 2015, à l'initiative de l'École nationale d'administration (ENA), dont la proposition de loi de notre collègue Costes s'est inspirée pour montrer que le mouvement concernait surtout le corps de l'Inspection des finances.
Si l'on considère le problème sous l'angle des salaires, il faudra bien constater qu'aucun texte régissant la fonction publique n'est respecté. En créant des autorités administratives indépendantes (AAI), on développe un mouvement bilatéral avec le ministère du budget, grâce auquel on définit des rémunérations exorbitantes. On fait querelle aux sénateurs pour 6 000 euros, alors qu'une ministre touchait 205 000 euros dans ses fonctions antérieures à la tête de Business France. Richard Descoings touchait 537 000 euros lorsqu'il était directeur de Sciences Po. Sans parler de François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France.
Au-delà des rémunérations, il y a le pouvoir d'influence. Comme rapporteur spécial du compte d'affectation spéciale sur les participations financières de l'État, j'ai auditionné la présidente de la Française des Jeux. Nous lui avons demandé quel cabinet d'affaires était en charge de la question de la privatisation. L'endogamie et l'entre soi sont gênants. Certains appels d'offres ou appels à candidatures sont parfois curieux, même si nous ne voulons pas nous montrer soupçonneux. Il faudrait voir d'où viennent celles et ceux qui s'occupent des semi-privatisations des autorités administratives indépendantes ou des agences de l'État, et qui ont pu à ce point ne pas respecter les textes sur la fonction publique. Lorsqu'il y a mutation de fonction, un délai de 10 ans est exorbitant, mais 3 ans ce n'est pas assez. On a vu des hauts fonctionnaires, revenir au dernier jour de la dixième année pour repartir aussitôt. Le rapport de Jacques Mézard l'a bien montré. Si le Parlement ne se saisit pas de la question, les journalistes font le travail à notre place. Cette commission d'enquête est une occasion de changer la situation.