Intervention de Albéric de Montgolfier

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 18 avril 2018 à 9h05
Projet de programme de stabilité pour les années 2018 à 2022 — Communication

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier, rapporteur général :

Nous examinons ce matin le projet de programme de stabilité 2018-2022.

C'est un document important car il s'agit du support des engagements européens de notre pays en matière budgétaire. Il s'accompagne du programme national de réforme, qui a pour finalité d'exposer les mesures programmées ou déjà mises en oeuvre afin de réaliser les objectifs fixés.

Dans le cadre du semestre européen, ces deux documents doivent être transmis à la Commission européenne avant le 30 avril. Compte tenu de l'importance que revêt ce document, un débat en séance publique aura lieu ce soir, comme le souhaitait notre commission.

Conformément à une tradition établie de la commission des finances du Sénat, qui publie un avis circonstancié sur les projets de programme de stabilité depuis 2011, je me suis attaché à examiner le scénario macroéconomique sous-jacent au projet de programme de stabilité, avant d'apprécier la crédibilité de la trajectoire proposée par le Gouvernement ainsi que sa compatibilité avec les règles budgétaires européennes.

Commençons par le scénario macroéconomique du Gouvernement, qui apparaît dans l'ensemble raisonnable, même s'il reste soumis - l'actualité nous le montre chaque jour - à des aléas importants.

Comme vous le savez, l'économie française s'oriente vers une reprise plus vigoureuse qu'escompté depuis le printemps 2017. Le Fonds monétaire international (FMI) l'a encore rappelé hier.

Déjouant les prévisions, le produit intérieur brut (PIB) a ainsi progressé de 2,0 % l'an dernier, après plusieurs années décevantes. Claude Raynal nous dira que c'est grâce aux réformes du Président François Hollande - j'anticipe.

En tout cas, le constat est là : en ce début d'année, les principaux indicateurs conjoncturels restent bien orientés, tandis que le profil de la croissance française apparaît très favorable. En effet, à l'issue de l'exercice 2017, l'acquis de croissance pour l'année 2018 s'élève à 0,9 %, contre 0,4 % à la fin de l'année 2016.

Dans ce contexte porteur, le présent projet de programme de stabilité est, sans surprise, marqué par une révision à la hausse de la prévision de croissance pour l'année 2018, qui s'établit désormais à 2,0 %, contre 1,7 % initialement.

L'hypothèse retenue par le Gouvernement apparaît raisonnable, à un niveau légèrement inférieur à la moyenne des estimations.

La prévision de croissance pour l'année 2019, fixée à 1,7 % dans le cadre de la loi de programmation, est également revue à la hausse, de 0,2 point.

Contrairement à la prévision de croissance pour l'année 2018, elle se situe dans la fourchette haute des estimations disponibles.

Enfin, sur la période 2020-2022, il est fait l'hypothèse que la croissance française restera stable à 1,7 %.

Il s'agit d'un scénario intermédiaire entre celui du FMI, plus optimiste, et celui de la Commission européenne, plus pessimiste.

Si le débat sur le cadrage macroéconomique du Gouvernement se focalise le plus souvent sur le scénario de croissance retenu, se concentrer sur cette seule variable serait une erreur. En effet, le déficit public est davantage sensible à l'hypothèse d'élasticité des prélèvements obligatoires au PIB qu'à l'estimation de la croissance. En 2017, c'est d'ailleurs davantage l'élasticité que la croissance qui a permis de ramener le déficit sous le seuil de 3 % du PIB.

Ainsi que cela est traditionnellement observé en période de reprise, les prélèvements obligatoires ont spontanément évolué plus rapidement que l'activité tant en 2016 - avec une élasticité de 1,3 - qu'en 2017 - avec une élasticité de 1,5.

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018, le Gouvernement avait toutefois fait preuve de prudence, en retenant pour cette année une hypothèse d'élasticité unitaire. Dans le présent projet de programme de stabilité, l'hypothèse d'élasticité retenue est légèrement révisée à la hausse, de 0,1 point.

Si cette prévision est plausible, il peut être noté que l'élasticité n'est restée supérieure à l'unité pendant trois exercices consécutifs qu'à une seule reprise (1999-2001) au cours des vingt-cinq dernières années. Le scénario pour les années 2019-2022 demeure en revanche inchangé, avec une élasticité unitaire tout au long de la période.

Pour terminer, j'ai souhaité analyser de façon plus approfondie le scénario de remontée des taux d'intérêt sous-jacent à la trajectoire budgétaire gouvernementale.

En effet, si l'amélioration des conditions macroéconomiques et la normalisation progressive de la politique monétaire de la Banque centrale européenne devraient exercer une pression à la hausse sur les taux d'intérêt, la question du rythme de cette remontée est décisive pour les finances publiques.

Pour les années à venir, le Gouvernement retient l'hypothèse d'une remontée des taux d'intérêt au rythme moyen de 75 points de base par an. C'est un scénario qui est prudent. En effet, le rythme de remontée des taux retenu est près de deux fois plus rapide que celui anticipé tant par les organismes privés de conjoncture que par la majorité des pays membres de la zone euro.

Tout cela n'est pas neutre ! Si l'on retenait un scénario de remontée des taux inspiré du consensus des économistes - consensus forecasts -, la charge d'intérêts de l'État serait inférieure de 8 milliards d'euros en 2022. Le Gouvernement disposerait ainsi d'une forme de réserve de précaution lui permettant d'absorber les éventuels dérapages constatés sur les dépenses pilotables.

Donc on peut considérer, globalement, que le cadrage macroéconomique retenu par le Gouvernement constitue « une base raisonnable pour asseoir une programmation des finances publiques à moyen terme » - ce sont les termes retenus par le Haut Conseil des finances publiques dans son avis.

S'il apparaît aujourd'hui raisonnable, le scénario macroéconomique sur lequel est construit le présent projet de programme de stabilité reste toutefois soumis à des aléas importants - le Gouvernement le reconnaît d'ailleurs.

Au niveau international, c'est l'orientation de la politique commerciale des États-Unis qui constitue la principale incertitude. Elle est susceptible de peser à la baisse sur la croissance mondiale en déclenchant une spirale protectionniste. Une « guerre commerciale » serait extrêmement dangereuse. Les risques financiers liés à une correction sur les marchés actions - voire à un « krach » boursier - et à une remontée non contrôlée des taux d'intérêt, dans un contexte d'excès d'endettement au niveau mondial, demeurent également des motifs de préoccupation. Enfin, la possibilité d'un « atterrissage brutal » de l'économie chinoise reste évoquée. Le pire n'est pas toujours sûr mais les risques sont nombreux.

Au niveau européen, outre les incertitudes sur la position des économies de la zone euro dans le cycle - le rythme d'atterrissage reste très incertain pour de nombreux pays -le risque politique reste élevé, avec le Brexit et le résultat des élections italiennes.

Au niveau national, outre les événements exceptionnels qui pourraient peser sur la croissance - les conflits sociaux, le risque terroriste -, un doute demeure sur la capacité de l'appareil productif français à répondre à la hausse de la demande adressée. Concrètement, si la croissance de la demande mondiale se traduit par l'importation de téléviseurs chinois, cela sera problématique pour la croissance française. Par ailleurs, il existe une inquiétude grandissante sur la dynamique du crédit aux entreprises non financières et aux ménages, qui a d'ores et déjà conduit le Haut Conseil de stabilité financière à limiter les expositions des banques systémiques sur les grandes entreprises françaises les plus endettées.

Aussi, conformément à une tradition établie de la commission des finances du Sénat, deux scénarios macroéconomiques alternatifs ont été construits à partir des prévisions des instituts de conjoncture les plus optimistes et pessimistes, afin d'essayer de circonscrire le champ des possibles.

Le résultat des simulations, dont vous trouverez les hypothèses dans le rapport, confirme la forte sensibilité du solde public au scénario retenu : le déficit atteindrait 1,6 % du PIB en 2019 dans le scénario favorable et s'établirait à un niveau - 3,1 % du PIB - légèrement supérieur au seuil de 3 % du PIB dans le scénario défavorable.

La prévision du Gouvernement se situe pratiquement à égale distance du scénario favorable et du scénario défavorable, venant ainsi confirmer le caractère central des hypothèses macroéconomiques sous-jacentes au présent projet de programme de stabilité.

Venons-en maintenant à l'analyse de l'exécution budgétaire.

En 2017, le déficit atteint, comme vous le savez, 2,6 % du PIB, soit un résultat supérieur de 0,3 point de PIB à la dernière prévision gouvernementale, ouvrant ainsi la voie à une sortie de la France du volet correctif du pacte de stabilité à l'été. Pour rappel, cela suppose non seulement que le déficit 2017 soit contenu à 3 % du PIB en exécution, mais également que la Commission européenne estime que le déficit ne dépassera pas ce seuil en 2018 et en 2019 dans ses prévisions du printemps 2018.

Lors de l'examen de la loi de programmation des finances publiques, une incertitude demeurait concernant l'exercice 2019, avec la transformation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en baisse de cotisations sociales, qui se traduira pour l'État par un surcoût temporaire d'environ un point de PIB.

Six mois plus tard, il paraît désormais acquis que la France sortira du volet correctif du pacte de stabilité dès cette année. En effet, dans la nouvelle trajectoire gouvernementale, le déficit public anticipé pour 2019 s'élève à 2,4 % du PIB, ce qui laisse une marge de sécurité très significative.

Plus globalement, l'amélioration du contexte macroéconomique devrait permettre un redressement accéléré de la situation des finances publiques au cours du quinquennat, avec un recul plus prononcé de la dette et du déficit publics dans la nouvelle trajectoire gouvernementale.

On peut donc se féliciter de la sortie prochaine de la France de la procédure pour déficit excessif : mieux vaut tard que jamais, après trois échecs successifs. Mais il faut s'interroger sur la pérennité du redressement des comptes publics.

En effet, le retour du déficit nominal sous le seuil de 3 % du PIB en 2017 tient à la reprise économique et au dynamisme des prélèvements obligatoires, et non à un effort structurel en dépense.

En l'absence de « bonne nouvelle » en recettes, liée à la croissance et à l'élasticité des prélèvements obligatoires, il apparaît ainsi que le déficit nominal se serait établi à 3,4 % du PIB en 2017. Disons-le autrement : sans le bénéfice de la conjoncture, les différentes mesures de redressement décidées par le Gouvernement à la suite de la publication des résultats de l'audit des finances publiques par la Cour des Comptes, pour un montant de 0,2 point de PIB, auraient été insuffisantes pour contenir le déficit à 3 % du PIB.

Si le dynamisme des recettes a permis un recul du déficit nominal plus rapide qu'escompté, il a en revanche fait obstacle à la stabilisation de la part des prélèvements obligatoires dans la richesse nationale.

Alors même que l'effet des mesures nouvelles en prélèvements obligatoires, hors mesures exceptionnelles, est neutre en 2017, la part des prélèvements obligatoires dans la richesse nationale a progressé de 0,8 point, pour atteindre 45,4 % du PIB.

Le présent projet de programme de stabilité maintient l'objectif initial du Gouvernement consistant modestement à faire baisser d'un point la part des prélèvements obligatoires dans la richesse nationale d'ici la fin du quinquennat.

Dans la nouvelle trajectoire, le taux de prélèvements obligatoires atteindrait ainsi 44,3 % du PIB en 2022, ce qui resterait insuffisant pour revenir sur la hausse observée au cours du précédent quinquennat.

J'en viens maintenant à la situation structurelle de nos finances publiques.

Si la réduction du déficit nominal a été portée par la conjoncture, tel a paradoxalement aussi été le cas de l'évolution du déficit structurel, qui s'est réduit de 0,5 point l'an dernier, pour atteindre 2,0 % du PIB.

En effet, le solde structurel constitue un outil très imparfait - on peut avoir des débats à l'infini - qui ne permet pas d'exclure l'incidence de l'évolution de l'élasticité des prélèvements obligatoires.

La décomposition de l'évolution du solde structurel permet toutefois de faire apparaître que la « composante non discrétionnaire », liée aux fluctuations de l'élasticité, explique la totalité de l'amélioration observée l'an dernier.

Cela risque d'ailleurs de poser une difficulté politique au Gouvernement, car il avait soutenu, dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques, une règle de « cagnotte » proposée par l'Assemblée nationale, qui permet de dépenser jusqu'à la moitié des « bonnes nouvelles » constatées en exécution sur le solde structurel. Nous avions, vous vous en souvenez, une position différente.

Si la réduction du déficit structurel s'explique entièrement par l'élasticité des prélèvements obligatoires, l'effort structurel en dépense est, pour la première fois depuis 2012, négatif.

Cela s'explique par le fait que les résultats obtenus l'an dernier en matière de maîtrise de la dépense sont décevants : la croissance de la dépense publique en volume s'élève ainsi à 1,5 % en 2017, ce qui correspond à un dépassement de 0,6 point de l'objectif fixé par la loi de programmation.

Ce dépassement s'accompagne en outre de la fixation d'un objectif de maîtrise de la dépense moins ambitieux pour 2018. Alors que le Gouvernement avait prévu une stabilisation en volume de la dépense publique lors du débat d'orientation des finances publiques, il entend désormais contenir sa croissance à 0,7 %, contre 0,6 % dans la loi de programmation. Je me souviens encore du ministre qui nous annonçait dans l'hémicycle que l'on stabiliserait pour la première fois la dépense publique en volume !

Les économies à réaliser en 2018 s'élèvent ainsi à 11 milliards d'euros, contre 20 milliards d'euros dans le scénario du débat d'orientation des finances publiques. Le Gouvernement profite donc de la reprise économique pour renoncer à une partie de ses efforts de maîtrise de la dépense.

J'en viens maintenant à la nouvelle trajectoire 2018-2022, en commençant par examiner sa compatibilité avec nos engagements européens.

Le respect des règles budgétaires apparaît aujourd'hui indispensable, alors que les reports successifs du retour du déficit sous le seuil de 3 % du PIB ont placé la France dans une situation atypique par rapport à ses partenaires européens.

On peut se féliciter de la meilleure tenue de nos comptes mais nous restons dans le bas du tableau européen. Avec l'Espagne, la France est ainsi le seul pays qui se pose encore la question des « 3 % » : dans la zone euro, le déficit moyen est proche de 1 % du PIB ! Vous avez d'ailleurs vu que l'Allemagne a d'ores et déjà annoncé des résultats meilleurs qu'escompté.

De façon préoccupante, ce différentiel nourrit la divergence des taux d'endettement observée depuis 2014, qui atteint désormais 7 points de PIB avec la zone euro et près de 40 points de PIB avec l'Allemagne. Cela a de quoi nous inquiéter, sachant que nous étions en 2010 sur la même ligne de départ.

C'est précisément pour éviter ce type de divergence que les règles européennes en matière budgétaire ont été mises en place.

Malheureusement, comme l'ancienne majorité, la nouvelle majorité semble vouloir s'accommoder des règles : comme je l'avais déjà souligné à l'automne dernier, la réduction annuelle du déficit structurel prévue par le Gouvernement est très inférieure aux prescriptions du pacte de stabilité. Elle pourrait même déboucher à l'issue de l'exercice 2019 sur l'ouverture d'une procédure pour « déviation significative », qui peut conduire à une sanction financière. Une fois encore, la France devra donc compter sur une interprétation particulièrement « constructive » des règles par les institutions européennes pour « passer entre les mailles du filet ».

Non seulement la trajectoire budgétaire présentée par le Gouvernement apparaît difficilement compatible avec nos engagements européens, mais en outre, son respect semble loin d'être assuré.

En effet, dans la mesure où l'effort de redressement repose, à juste titre, exclusivement sur la maîtrise de la dépense, il impliquerait - je parle bien au conditionnel - la mise en oeuvre d'un programme d'économies d'une ampleur inédite.

Si le budget 2018 a engagé un premier effort de réorientation de la dépense publique rompant avec la logique du « rabot », en particulier dans les domaines de l'emploi et du logement - même si l'on peut toujours contester la brutalité de certaines coupes -, la crédibilité de la trajectoire gouvernementale reste difficile à apprécier au-delà, tant les économies demeurent peu documentées.

La mise en oeuvre d'une démarche volontariste d'identification d'économies ciblées dans le cadre du processus « Action publique 2022 » paraît louable mais les précédents échecs de la « modernisation de l'action publique » (MAP) et des revues de dépenses invitent à la plus grande prudence. Je suis un peu échaudé par ces précédents exercices. Quelqu'un est-il capable de nous dire ce qu'a apporté la MAP ? Bonne chance !

Or, un « dérapage » de la dépense publique analogue à celui observé en 2017 compromettrait le redressement des comptes publics programmé, ainsi que l'illustre la simulation présentée à l'écran.

Dans ce scénario, le déficit public manquerait de dépasser le seuil de 3 % du PIB en 2019 et la dette publique resterait pratiquement stable jusqu'en 2020.

Compte tenu de cette forte sensibilité de la trajectoire gouvernementale à l'évolution de la dépense publique, il apparaît indispensable d'adopter sans tarder une stratégie crédible de maîtrise de cette dernière.

À cet égard, je maintiens que le Gouvernement pourra difficilement faire l'économie de réformes visant à maîtriser la masse salariale publique et les dépenses de retraite, qui représentent près de la moitié du total de la dépense publique et demeurent pourtant jusqu'à présent deux « angles morts » de sa politique. L'articulation des missions de l'État et des collectivités territoriales doit également être revue.

Au-delà, le programme de stabilité ne tient aucunement compte de deux annonces récentes du Président de la République - à savoir la suppression totale de la taxe d'habitation et la reprise d'une partie de la dette de SNCF Réseau.

C'est très surprenant car ces deux annonces sont susceptibles de bouleverser la trajectoire budgétaire, dans la mesure où elles pourraient coûter jusqu'à 60 milliards d'euros.

Ainsi, la suppression complète de la taxe d'habitation se traduirait par un montant à compenser très significatif, compris entre 10 milliards d'euros et 14 milliards d'euros selon que l'on prend en compte ou non la dynamique de la taxe d'habitation jusqu'à sa suppression. Le coût de cette mesure pourrait éventuellement être réduit en cas de maintien de la taxe d'habitation au titre des résidences secondaires, dont le rendement s'élève à 2,3 milliards d'euros. Le Président de la République a en revanche exclu la création d'un nouvel impôt.

En parallèle, il a confirmé que l'État reprendra progressivement une partie de la dette du gestionnaire d'infrastructures SNCF Réseau à partir du 1er janvier 2020.

Une opération de reprise d'une partie de la dette de SNCF Réseau, qui atteint désormais 46,6 milliards d'euros, pourrait peser lourdement sur la situation des finances publiques, par différents canaux :

- la reprise serait analysée comme une dépense et creuserait donc temporairement le solde public à hauteur du montant de l'opération ;

- les intérêts payés par SNCF Réseau, qui s'élevaient à 1,2 milliard d'euros l'an passé, devraient à l'issue de l'opération être pris en charge par le budget de l'État et dégraderaient donc le solde public jusqu'à extinction de la dette ;

- l'opération pourrait également peser sur la dette publique, si le montant repris excède la part de la dette de SNCF Réseau déjà requalifiée en dette publique par l'Insee - soit 10 milliards d'euros.

Le surcoût temporaire lié à l'opération de reprise pourrait être particulièrement complexe à intégrer à la trajectoire budgétaire. En effet, l'impact de l'opération sur le déficit public, quand bien même celle-ci serait réalisée en plusieurs tranches, doit en principe être comptabilisé en une seule fois. Cela promet de beaux débats avec Eurostat. Une solution consisterait peut-être à ce que les opérations de reprise de dette fassent l'objet d'une décision annuelle, à l'image de ce qui est parfois prévu pour les remises de dette en faveur des pays très endettés. Cela permettrait une répartition de l'effort budgétaire sur plusieurs exercices et de conditionner les opérations de reprise à une amélioration effective de la situation financière de l'entreprise.

Une marge de sécurité suffisante devra en tout état de cause être conservée par rapport au seuil de déficit de 3 % du PIB et nous interrogerons le Gouvernement ce soir sur ses intentions.

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