Pour répondre à Michel Canévet, les intérêts du grand emprunt sont bien intégrés dans le déficit au sens de Maastricht.
Je partage l'analyse de Gérard Longuet, il existe des incertitudes fortes sur la capacité du Gouvernement à atteindre les objectifs affichés en matière d'économies. J'ai évoqué des pistes. La masse salariale représentant 130 milliards d'euros et 40 % des dépenses de l'État, on ne pourra pas laisser ce sujet de côté. S'agissant de la réforme des retraites, il faudra nécessairement poser la question du report de l'âge de départ effectif. Il me semble en outre nécessaire de s'interroger sur les missions de l'État par rapport à celles exercées par les collectivités territoriales. Des doublons existent en matière de dépenses sociales, de gestion des routes, etc. Nous sommes tous rapporteurs spéciaux, chacun peut faire des propositions d'économies dans le champ couvert par son rapport budgétaire. Les réformes présentées dans le programme de stabilité sont, avant tout, technocratiques. Ce n'est pas parce qu'un comité composé de gens très savants est mis en place que cela aboutira à des économies. Il faut que cette question soit abordée avec une volonté politique réelle de s'attaquer aux vrais sujets. Jusqu'à présent les économies étaient portées par les ministères régaliens, on sait que cette marge n'existe plus. Or, dans le programme « Action publique 2022 », il est impossible de trouver un seul centime d'économie à ce stade. À l'inverse, l'accompagnement de la transformation des administrations nécessitera de mobiliser 700 millions d'euros...
Il y a effectivement de multiples aléas qui pèsent sur ces hypothèses de croissance, comme le soulignait tout à l'heure Claude Raynal. La prévision est un exercice difficile, notamment en économie. Vous connaissez l'aphorisme : les économistes ont été inventés pour que les météorologistes se sentent moins seuls ! C'est sans doute vrai.
S'agissant du taux d'endettement des pays de la zone euro, même en excluant la France et l'Allemagne, notre pays demeurerait plus endetté que la moyenne de nos voisins et naturellement plus que l'Allemagne.
Fabienne Keller m'a interrogé sur les effets de la transformation du CICE en baisse de charges : elle représentera un point de PIB de déficit supplémentaire en 2019, mais pour cette seule année.
Marc Laménie m'a interrogé sur les raisons qui font que l'Allemagne est plus sérieuse financièrement que la France : il faut nous entretenir avec Wolfgang Schäuble, qui était jusqu'à l'automne dernier ministre fédéral des finances. Il serait trop long de rentrer dans les détails, mais l'Allemagne a fait les efforts que nous n'avons pas faits.
Concernant la suppression totale de la taxe d'habitation, le Président de la République a indiqué qu'il n'y aurait pas de nouvel impôt pour financer cette mesure. Les résidences secondaires pourraient toutefois continuer à être taxées, ce qui représenterait une recette de 2,3 milliards d'euros, mais en tout état de cause il demeure un « trou » dont l'ampleur varie selon l'hypothèse retenue sur la dynamique de cette taxe.
Au sujet de la SNCF, je ne suis pas certain de l'opportunité de créer une structure de cantonnement de la dette. Le coût de financement de la SCNF est légèrement plus élevé que celui de l'État. Si la dette est reprise, l'État devra se substituer à la SNCF pour payer les intérêts. Sans parler des effets sur l'endettement et le déficit public.
Je m'étonne effectivement qu'un document présentant notre trajectoire budgétaire jusqu'en 2022 n'aborde pas ces deux questions. Je vous cite in extenso la réponse que le Gouvernement m'a faite sur la taxe d'habitation : « les travaux menés sur la suppression de la taxe d'habitation sont en cours » et « dans l'attente de leur conclusion et des propositions de la mission Bur-Richard sur la refonte de la fiscalité locale, le programme de stabilité n'intègre pas cette mesure ». Les réponses concernant la SNCF sont du même acabit : circulez, il n'y a rien à voir !
Je remarque par ailleurs que l'annonce des premières conclusions d'« Action publique 2022 » est repoussée. Nous aurions pu espérer des perspectives d'économies qui crédibilisent la trajectoire financière. Le Gouvernement évoque des pistes, comme la réforme de l'audiovisuel, mais on ne voit rien venir. Les pistes sont connues : réforme des retraites, missions de l'État par rapport aux collectivités territoriales, fonction publique, etc. Au demeurant, chaque rapporteur spécial peut faire des propositions d'économies dans son secteur.
En définitive, ce programme de stabilité présente de nombreuses incertitudes et nous pourrons ce soir interroger le Gouvernement sur ces points.