Je n'ai pas dit que j'étais choquée par la surveillance particulière d'un certain nombre de détenus radicalisés, mais qu'il fallait veiller à ne pas recréer les anciens QHS. Dans les quartiers que j'ai contrôlés à Condé-sur-Sarthe ou à Vendin-le-Vieil, les mesures de sécurité sont déjà considérables : le détenu ne peut sortir de sa cellule qu'accompagné de trois gardiens habillés en Robocop ! Comment faire encore plus ? Les organisations syndicales demandent des quartiers complètement étanches, des mesures encore plus sévères... Jusqu'où peut-on aller ?
Le cas de Salah Abdeslam est révélateur de cette escalade. Depuis son incarcération en France, il fait l'objet d'une vidéosurveillance 24 heures sur 24 - y compris aux toilettes. Cette pratique n'était encadrée que par un simple arrêté de 2014 ; elle était donc illégale jusqu'à la loi du 21 juillet 2016 qui prévoit cette possibilité pour « les personnes dont l'évasion ou le suicide pourraient avoir un impact important sur l'ordre public eu égard aux circonstances particulières à l'origine de leur incarcération et l'impact de celle-ci sur l'opinion publique ». Si une telle mesure se conçoit pendant les premiers temps du choc carcéral, peut-on la maintenir pendant des années sans atteinte aux droits fondamentaux ? Sans compter que la loi de juillet 2016 ne la circonscrit pas aux seuls cas de terrorisme : cette définition pourrait tout aussi bien s'appliquer aux affaires de pédophilie, par exemple. C'est dangereux. Oui, la problématique est récente dans son ampleur, mais des alertes avaient été lancées bien avant 2015.