La psychiatrie a peu de valeur prédictive. Chez des personnes présentant des pathologies avérées, rien ne permet de déterminer si elles vont passer à l'acte, et à quel moment. À titre d'exemple, sur la population schizophrène, 90 à 95 % des personnes ne sont pas dangereuses, ne passeront pas à l'acte, mais souffriront d'attaques du monde extérieur. En revanche, on aura un cas, à un moment donné, où la personne malade prendra un couteau et égorgera deux infirmières, comme cela s'est passé il y a quelques années.
Qu'est ce qui fait qu'à un moment, on va passer à l'acte ? On peut parfois comprendre rétroactivement. En matière d'endoctrinement, à chaque étape, on franchit un seuil. Il y a 7 étapes en tout. La première étape consiste à créer un lien de confiance avec la personne en lui faisant miroiter le fait que le recruteur est celui qui la connaît le mieux. Ensuite, on lui fait croire que l'univers est contre elle, que son entourage - ses professeurs - est contre elle, puis que ses parents le sont également. Au final, on arrive à la création d'une unité groupale. Cette étape est décisive. La pensée groupale qui émerge est alors partagée par l'ensemble des membres du groupe et se substitue à leurs pensées individuelles. Et cette pensée groupale peut aller vers un passage à l'acte d'un individu. C'est ce qui s'est passé dans le cas de la tentative d'attentat par trois femmes devant Notre-Dame de Paris. Elles avaient 17, 25 et 36 ans. Elles ont été convaincues par celle de 17 ans par internet, qui s'est fait passer pour un prince charmant. Grâce à ces liens virtuels, elles ont créé une sororité très forte, sans jamais se rencontrer. Il ne s'agissait pas de trois psychopathes au départ, mais de trois femmes un peu perdues. L'une était un peu plus dominante que les autres et était elle-même sous la domination de Rachid Kassim. Ce qui a fait basculer vers le passage à l'acte, c'est cette appartenance.