Je partage vos préoccupations sur les enjeux d'aménagement du territoire.
Je souhaite revenir sur l'organisation qui prévaut en matière de desserte de TGV.
Aujourd'hui, la péréquation entre les dessertes rentables et celles qui le sont moins se fait au sein de l'activité TGV. Il est proposé que, demain, elle se fasse par les péages. Ainsi, le péage Paris-Chambéry serait moins élevé que celui de Paris-Lyon, dans la mesure où le segment Paris-Lyon est plus rentable. C'est l'esprit du texte voté à l'Assemblée nationale, ce qui est conforme aux textes européens. C'est la philosophie du dispositif que nous voulons mettre en place. Sur cette question, les discussions sont engagées avec l'Arafer, qui doit émettre un avis conforme sur les propositions de péage de SNCF Réseau.
On dit que deux tiers des dessertes sont non rentables. En réalité, sur deux tiers des dessertes, la rentabilité n'est pas jugée suffisante par la SNCF. Par conséquent, il y a beaucoup plus de dessertes rentables, à condition qu'on n'attende pas une rémunération des capitaux investis trop haute. Je suis confiante sur le levier que cela représenterait.
Le texte voté à l'Assemblée nationale prévoit la possibilité de conventionner des dessertes qui ne seraient pas soutenables par elles-mêmes ; et ce serait essentiellement l'État. Aujourd'hui, deux régions, Hauts-de-France et Bretagne, conventionnent déjà des dessertes TGV sur leurs territoires. La région Bretagne a fait le choix d'avoir plus de liaison TGV qui continuent au-delà de Rennes. C'est ce type de conventionnement et de choix que nous voulons maintenir et promouvoir.
S'agissant de la dette, quelle est la logique du Gouvernement ? Cela fait des décennies que l'on tourne autour de ce sujet. Le Président de la République a indiqué qu'il y aurait une reprise progressive de la dette à partir de 2020, au moment où se mettra en place la nouvelle organisation. Le Premier ministre a précisé qu'il s'agirait d'une part substantielle de la dette.
Le travail en cours avec la SNCF consiste à définir une trajectoire financière durablement équilibrée et soutenable. Personne ne comprendrait que l'État reprenne une dette qui serait amenée à se reconstituer. Cela suppose des efforts de la part de l'entreprise, un programme d'investissements de remise à niveau du réseau plus important que celui qui était prévu dans le contrat entre l'État et SNCF Réseau. Le montant de la dette sera défini de telle sorte que, en 2022, cette trajectoire soit soutenable.
J'en viens à l'aménagement du territoire. Certains à l'Assemblée nationale font semblant de croire que les lignes les moins fréquentées seraient fragilisées par l'ouverture à la concurrence au motif qu'elles ne seraient pas rentables. Je rappelle qu'il s'agit d'une délégation de service public : l'ouverture à la concurrence ne peut donc constituer une menace.
Pour augmenter la fréquentation des lignes, il faut par exemple procéder à des coordinations d'horaires ou à des rabattements. Il s'agit là aussi d'un enjeu important de la loi d'orientation des mobilités.
Le fret ferroviaire, en particulier le fret SNCF, constitue un enjeu important. Comme l'a annoncé le Premier ministre le 16 avril dernier, je travaille à un plan de relance du fret ferroviaire. Certes, le mouvement actuel fragilise beaucoup le fret ferroviaire et peut conduire à détourner durablement ses clients. Aujourd'hui, seul un train sur trois circule les jours de grève et la situation est très difficile pour les entreprises dépendantes du fret ferroviaire.
Le plan de relance du fret ferroviaire passera par des enjeux d'investissements, notamment la rénovation du réseau, et par des enjeux d'infrastructures. Par rapport à nos voisins, notamment les pays du nord de l'Europe, notre réseau est en étoile, avec des noeuds très encombrés. Ainsi, pendant les heures de pointe, aucun train de fret ne circule. Ne faut-il pas réserver des sillons, y compris aux heures de pointe, pour les faire passer ?
Il faut revenir sur les trajectoires de péage inscrites dans le contrat entre l'État et SNCF Réseau. C'est dans le cadre d'un contexte économique clarifié que la SNCF devra réfléchir à l'avenir de son activité fret, par une recapitalisation et une filialisation. La réflexion doit se poursuivre.
Les garanties d'indépendance de SNCF Réseau constituent également un enjeu majeur. Le Premier ministre a évoqué le système allemand dans lequel des textes ont fixé les règles et les garanties d'indépendance. Les échanges avec la Deutsche Bahn ont permis de bien comprendre comment garantir cette indépendance. Ce sont de telles dispositions que nous serons appelés à inscrire dans la loi, sous le contrôle de l'Arafer.
La discussion à l'Assemblée nationale a permis de repréciser les enjeux relatifs à l'Arafer. Il n'est pas question de revenir sur l'avis conforme que l'autorité doit émettre et la présence d'un régulateur indépendant est encore plus essentielle demain qu'aujourd'hui pour que l'État ou SNCF ne soient pas suspectés d'augmenter les péages pour freiner l'arrivée de la concurrence.
Nous souhaitons travailler sur la cohérence entre l'attente des opérateurs qui veulent avoir une vision pluriannuelle des péages et le contrat entre l'État et SNCF Réseau. Il faut une meilleure coordination entre l'association de l'Arafer à ces contrats pluriannuels et les avis qu'elle doit donner annuellement, pour ne pas se retrouver dans l'impasse de 2018.
S'agissant de Gares et Connexions, nous allons vers un assainissement par la reprise de la dette. Toutefois, les besoins d'investissements de cette entité ne rentreront pas dans la règle d'or de SNCF Réseau et ne doivent pas être bridés par les règles qui pourraient s'imposer à SNCF Réseau.