Intervention de Christine Prunaud

Réunion du 23 mai 2018 à 14h30
Programmation militaire pour les années 2019 à 2025 — Rapport annexé

Photo de Christine PrunaudChristine Prunaud :

En matière d’Europe de la défense, il faut reconnaître que la France se veut ambitieuse. Fonds européen de défense, création de forces d’intervention communes : Paris ne ménage pas ses efforts pour faire émerger une défense fédérale au niveau européen.

Permettez-moi tout de même, chers collègues, de vous faire part de nos réserves. Peut-être, madame la ministre, serai-je rassurée par les réponses que vous m’apporterez.

Un premier écueil tient à la coordination de cette Europe de la défense avec nos partenaires non européens, au premier rang desquels les États-Unis et l’OTAN. Tous les pays de notre continent ne sont pas parties prenantes à l’Alliance atlantique : comment réussir à coordonner une position européenne et une position atlantique dans ce même cadre ?

La création d’un nouvel organe de défense pourrait créer une confusion semblable à celle qui existe déjà entre l’ONU et l’OTAN. À moins que cette Europe de la défense ne soit conçue comme un levier pour amener les pays européens non membres de l’OTAN à intégrer cette organisation… Cette inquiétude est d’autant plus prégnante que le Fonds européen de défense est fortement convoité, nous semble-t-il, par les grands groupes états-uniens de défense.

Second écueil : le proto-fédéralisme qu’implique une Europe de la défense. Quelle force de gouvernance, alors même que l’Union européenne est avant tout monétaire et économique ? Mener cette réflexion est d’autant plus essentiel que le projet s’articule autour d’une rationalisation des industries de défense, destinée à éviter les doublons. Cette situation nous fait craindre une incapacité de la France à maintenir un semblant d’indépendance industrielle et de défense et un nouveau drame humain dans l’emploi industriel.

L’épisode des ventes d’armes à l’Arabie saoudite est symptomatique de ce problème : Paris réaffirme sa volonté de poursuivre son commerce avec Riyad et le Groupe d’États contre la corruption, le GRECO, s’oppose fermement aux ventes d’armes à ce royaume.

Aujourd’hui, il nous faut réaffirmer le caractère solidaire de l’Union européenne, sans remettre en cause le principe de souveraineté des peuples et des États, à moins, bien évidemment, que l’instauration d’une défense commune ne soit soumise à consultation populaire.

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