Intervention de Robert Laufoaulu

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 23 mai 2018 : 1ère réunion
Projet de loi autorisant l'adhésion de la france à la convention concernant la compétence judiciaire la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale pour son application à saint-barthélemy à saint-pierre-et-miquelon dans les îles wallis et futuna en polynésie française en nouvelle-calédonie et dans les terres australes et antarctiques françaises — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Robert LaufoauluRobert Laufoaulu, rapporteur :

Nous examinons aujourd'hui le projet de loi autorisant l'adhésion de la France, pour le compte de Saint-Barthélemy, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna, la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie et les Terres australes et antarctiques françaises, à la convention concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, signée à Lugano, le 30 octobre 2007, par l'Union européenne, d'une part, et l'Islande, la Norvège et la Suisse, d'autre part.

La « convention de Lugano II », entrée en vigueur le 1er janvier 2010, a pour objet de remplacer la convention de Lugano I de 1988, signée entre les États membres de la Communauté européenne et les États membres de l'Association européenne de libre-échange. Lugano I était « une convention parallèle » à la convention de Bruxelles de 1968 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, conclue entre les six États membres fondateurs de la Communauté européenne en vue de faciliter le règlement des litiges civils et commerciaux transfrontières. La convention de Bruxelles s'était révélée si efficace qu'il avait été jugé nécessaire de l'étendre aux pays de l'Association européenne de libre-échange (AELE).

Par la suite, le traité d'Amsterdam de 1997 ayant communautarisé la coopération judiciaire civile, la convention de Bruxelles a été convertie en un règlement entré en vigueur en mars 2002, refondu en janvier 2015.

Par la suite, en raison du parallélisme existant entre les régimes instaurés par la convention de Bruxelles et par la convention de Lugano I, des négociations ont été engagées en vue de l'adoption d'une convention de Lugano II calquée autant que possible sur les dispositions du règlement Bruxelles I.

Pourquoi adhérer à Lugano II ? Le règlement Bruxelles I prévoit qu'il remplace, entre les États membres, la convention de Bruxelles de 1968, sauf en ce qui concerne les territoires des États membres qui entrent dans le champ d'application territorial de cette convention et qui sont exclus du présent règlement, en vertu de l'article 355 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Celui-ci prévoit que les pays et territoires d'outre-mer (PTOM) - la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Pierre-et-Miquelon, les Terres australes et antarctiques françaises et les îles de Wallis et de Futuna - font l'objet du régime spécial d'association. Les actes adoptés par les institutions de l'Union sur le fondement du traité ne s'appliquent pas à eux.

Pour mémoire, la dernière décision d'association outre-mer qui établit une nouvelle relation entre l'Union européenne et les PTOM date de novembre 2013 et est entrée en vigueur en janvier 2014. Elle a pour but principal « la promotion du développement économique et social des pays et territoires, et l'établissement de relations économiques étroites entre eux et l'Union dans son ensemble ». En conséquence, dans les PTOM, le régime de la détermination des compétences, de la reconnaissance et de l'exécution des décisions civiles et commerciales reste celui de la convention de Bruxelles, qu'ils sont d'ailleurs les seuls à continuer d'appliquer.

En vue de rapprocher les règles applicables sur l'ensemble du territoire national, la France a choisi d'adhérer à la convention de Lugano II pour le compte de ses PTOM.

La Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française étant compétentes en matière de procédure civile, il sera nécessaire de procéder à une adaptation du droit de ces collectivités. Déjà, l'Assemblée de la Polynésie française et le Congrès de Nouvelle-Calédonie ont rendu un avis favorable sur ce projet de loi. Dans les autres PTOM, les articles 509-1 à 509-8 du code de procédure civile relatifs aux autorités chargées, au sein des juridictions compétentes, des formalités de reconnaissance et d'exécution des décisions transfrontières, seront applicables de plein droit.

À Wallis-et-Futuna où l'État est resté compétent en matière de procédure civile, l'application des dispositions des articles 509 et suivants du code de procédure civile a été étendue, comme le prévoit l'article 1575 du code de procédure civile. L'adaptation terminologique a été également été faite, puisque nous avons des tribunaux de première instance au lieu de tribunaux de grande instance et de tribunaux d'instance.

La convention de Lugano II se limite au droit civil et commercial, elle reprend les règles du droit international privé européen figurant dans le règlement Bruxelles I. La juridiction compétente est celle de l'État où le défendeur a son domicile. Cette règle est assortie d'exceptions. En vue de protéger la partie la plus faible - celle-ci ne pouvant, par principe, être assignée que devant les juridictions de son domicile -, la convention fixe aussi des règles spéciales en matière d'assurances, de contrats conclus par les consommateurs ou de contrats individuels du travail. Mais la convention prévoit aussi, sans considération de domicile, des compétences exclusives de tribunaux dans certaines matières - droits réels immobiliers, nullité ou dissolution des sociétés. Des règles en matière de litispendance et de connexité permettent aussi d'éviter que les juridictions de plusieurs États membres ne connaissent simultanément d'une demande ayant le même objet et la même cause. La convention pose le principe d'une reconnaissance mutuelle des décisions rendues sans qu'il soit besoin de recourir à une procédure complémentaire et limite les cas dans lesquels une décision n'est pas reconnue. Par ailleurs, principale innovation de la convention, un mécanisme d'exequatur simplifié est mis en place : les décisions exécutoires dans un État partie sont mises à exécution dans un autre État partie, sur requête de toute partie intéressée et à l'issue d'un contrôle purement formel.

En conclusion, je recommande l'adoption de ce projet de loi. La sécurité juridique en est améliorée, grâce à la circulation transfrontière des décisions de justice en matière civile et commerciale.

L'examen en séance publique est prévu le jeudi 31 mai 2018, selon la procédure simplifiée, ce à quoi je souscris.

Suivant la proposition du rapporteur, la commission a adopté, à l'unanimité et sans modification, le rapport et le projet de loi précité.

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