Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, cher Alain Milon, madame la rapporteur, mes chers collègues, alors que demain matin l’OPESCT présentera les conclusions des états généraux de la bioéthique organisés par le CCNE, nous voici réunis pour débattre d’un sujet qui concerne, lui aussi, les problématiques de génétique et de génomique.
En effet, la proposition de loi relative à l’autorisation des examens des caractéristiques génétiques sur les personnes décédées de M. Milon et de ses collègues, rapportée par Mme Deroche, s’inscrit au cœur de la bioéthique. On pourrait douter de l’opportunité d’étudier un tel texte en dehors des débats qui se tiendront lors de la révision des lois de bioéthique à venir, débats que je souhaite le plus apaisés possible.
Hélas ! je crains que les passions ne prennent le pas sur la raison – cela peut arriver, madame la ministre – et j’accueille donc favorablement l’étude de telles dispositions dès aujourd’hui. Ce qui est fait est fait !
Les éléments contenus dans le texte relèvent d’un ajustement presque technique de la législation actuelle.
Comme vous le savez, les progrès en génétique et en génomique des dernières années sont considérables. Imaginez-vous que moins de cinquante ans séparent la découverte du caryotype humain, en 1956, du premier séquençage complet de l’ADN du génome humain, en 2003 ? Comment croire que, il y a à peine vingt ans, les premiers cancers d’influence génétique étaient mis au jour, les premières controverses apparaissant également – sur la brevetabilité du vivant, notamment ?
Depuis lors, les politiques de santé publique ont été adaptées et ont pris en charge les personnes ayant un risque accru de développer certains cancers ou d’autres pathologies.
Grâce à la connaissance d’un facteur de risque – ici génétique –, le suivi est adapté, voire personnalisé, et l’équipe médicale pourra prendre des mesures de prévention ou effectuer des soins spécifiques qui influenceront grandement le pronostic du patient. Il s’agit non pas simplement d’identifier la présence ou non d’une mutation pathologique d’un gène, mais d’expliquer les conséquences de cette présence, les risques induits et la prise en charge qui en découlera. Le simple résultat ne saurait être appréhendé par la personne seule.
La présente proposition de loi cherche à permettre la réalisation de certains tests génétiques sur une personne décédée dans « l’intérêt de ses ascendants, descendants et collatéraux ». Cette proposition équilibrée respecte toutefois la volonté du patient qui se serait exprimée de son vivant contre la réalisation de tels tests.
Le Sénat, une fois de plus, dans sa grande sagesse, s’honore en répondant à une attente des professionnels pour une meilleure prévention.
Il faudra que le législateur demeure vigilant sur ces questions d’utilisation de tests génétiques, leur nombre et leur finalité, car la baisse de leur coût et leur disponibilité en libre accès dans certains pays ne doivent pas laisser penser que l’information brute d’un résultat puisse être bien appréhendée par tout un chacun.
En plus de s’interroger sur la protection de données aussi personnelles que l’identification génétique, il convient de continuer à réserver la réalisation de tels tests au sein d’un dispositif médical de consultation génétique, de préférence pluridisciplinaire.
Mes chers collègues, ce texte relève bien évidemment de la bioéthique et représente une avancée qui aurait le mérite d’être adoptée en dehors de tout débat trop passionné. Il étend, mais de manière stricte, une technique existante, prévue dans un parcours précis, encadrée par des professionnels de santé en demande de ces outils.
Ces sujets relèvent évidemment d’une éthique profonde et propre à tout un chacun, et c’est pourquoi, à titre personnel, je voterai ce texte, avec les collègues de mon groupe siégeant à la commission des affaires sociales. Bien évidemment, le groupe La République En Marche, comme à son habitude s’agissant de ce type de questions, laisse chacun de ses membres voter selon sa vision personnelle du sujet.