Enfin, qu’en est-il de la convention collective de la branche ferroviaire ?
Nous avons précisé les ordonnances, notamment sur les conditions de transfert et sur la réintégration possible chez l’opérateur historique par le biais de notre amendement rectifié, voté à l’unanimité. Mais nous ne savons pour l’instant rien de plus que la tenue d’une réunion tripartite État-patronat-syndicats. Nous sommes en droit d’obtenir des précisions sur le rôle que vous comptez jouer dans ces négociations et sur ce que vous comptez y défendre.
Certes, ces trois éléments sont dans votre texte, mais je ne suis toujours pas convaincu de la pertinence du titre de votre projet de loi – Nouveau pacte ferroviaire –, tant ce texte reste incomplet pour mériter un tel intitulé.
En effet, vous ne proposez rien pour discriminer positivement le rail face à la route et à l’avion : dans un cas, l’usager paye une partie de l’infrastructure, pas dans les autres. À l’heure de la lutte contre le réchauffement climatique et de la transition énergétique, c’est insuffisant. Il conviendrait de valoriser les externalités positives du rail pour permettre un report modal.
De plus, un pacte ferroviaire digne de ce nom devrait concerner tout le rail. Or que constate-t-on ? Quasiment rien n’est dit sur le fret. Quant aux petites lignes et à l’aménagement du territoire, aux éventuels nouveaux développements, les imprécisions et incertitudes sont nombreuses, ce qui peut nous conduire à douter.
Il ne s’agit donc pas d’un nouveau pacte ferroviaire.
Par ailleurs, la nouvelle organisation de la SNCF que vous proposez risque, paradoxalement, d’affaiblir celle-ci, notamment en raison de cette règle d’or très stricte qui inquiète quant aux nouveaux projets de développement du rail, ou encore de la transformation en société anonyme qui va renchérir le coût du financement par une augmentation mécanique des taux d’intérêt.
La règle d’or, inventée en 2014, est une bonne chose ; son renforcement inquiète.
Rien ne nous permet d’imaginer que nous allons pouvoir sortir de la logique malthusienne qui prévaut depuis maintenant bien trop longtemps selon laquelle, régulièrement, on coupe des petites lignes et des services sur les tronçons moins fréquentés, atténuant ainsi l’effet réseau du rail.
Loin d’une opposition et d’une obstruction systématiques, nous avons soutenu de nombreuses idées nouvelles lors de ce débat : place croissante de l’intermodalité et des mobilités douces dans nos modes de déplacement, rôle des gares dans les territoires et nouvelles interactions à créer avec les collectivités, mise en œuvre d’un schéma de desserte d’intérêt national validé par le Parlement – garantie d’égalité entre les territoires –, nécessité de mettre plus de démocratie dans la gouvernance SNCF et d’affirmer le rôle du Haut Comité du système de transport ferroviaire, créé en 2014, pour un fonctionnement plus transparent… Certaines de ces propositions ont été partiellement reprises par notre assemblée.
Chers collègues, ce mardi, nous sommes toujours sous un régime d’ordonnances et le conflit social, très dur, se poursuit. Si la grève ne s’est malheureusement pas arrêtée au soir du débat au Sénat, c’est que des sources d’inquiétude persistent. Cependant, madame la ministre, vous nous avez annoncé une réunion tripartite, ce que nous apprécions.
Le calendrier initial nécessitait de finaliser l’ouverture à la concurrence. Pour ce faire, il n’était pas nécessaire de provoquer un tel conflit et d’aboutir à un texte qui n’est pas véritablement le nouveau pacte ferroviaire annoncé.
Dans ce contexte aussi incertain, madame la ministre, nous ne vous donnerons pas un chèque en blanc pour une destination inconnue et voterons contre ce projet de loi.