Intervention de Frédéric Marchand

Réunion du 5 juin 2018 à 14h30
Nouveau pacte ferroviaire — Explications de vote sur l'ensemble

Photo de Frédéric MarchandFrédéric Marchand :

Après plusieurs jours de débats sur le projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire, nous pouvons, sans forfanterie aucune, affirmer que nous le sommes.

Dire que le Sénat était attendu sur ce texte est un doux euphémisme. Nous n’avons pas failli. Le train est parti à l’heure indiquée et, après un parcours que certains pensaient parsemé d’embûches, il est arrivé en gare, sans retard, après un voyage sans doute harassant, mais ô combien passionnant !

La qualité de nos discussions fait honneur à la vie parlementaire. Oui, le débat a eu lieu. Les uns et les autres ont pu s’exprimer en fonction de leurs sensibilités. Voilà quelques semaines, certains nous avaient annoncé un débat confisqué par le Gouvernement, sous couvert d’ordonnances, et une réforme menée à la hussarde. Aujourd’hui, les mêmes tentent de nous expliquer que le débat n’a été rendu possible que par la pression exercée depuis le début du mouvement social.

Et si nous arrêtions, pour une fois, de raisonner de manière aussi manichéenne ? Pourquoi cette réforme n’aurait-elle pas été rendue possible par une seule et même volonté, à savoir l’attachement collectif au service public ferroviaire ?

Cette réforme ferroviaire n’est ni une victoire pour les uns ni une défaite pour les autres. C’est d’abord et avant tout la volonté, partagée sur l’ensemble de ces travées, de préserver notre service public ferroviaire à la française en l’armant de la meilleure façon qui soit face à l’ouverture à la concurrence.

Notre expression a été diverse et variée. C’est toute la force de la démocratie, empreinte parfois d’outrance et de mauvaise foi, qui a permis à toutes les sensibilités de s’exprimer en toute liberté de ton et de parole.

Je qualifiais le débat de passionnant, car tous les sujets de la réforme ont été abordés, grâce au formidable travail préalable effectué par le rapporteur, Gérard Cornu, et par le président de la commission, Hervé Maurey, qui ont mis leur énergie et leurs compétences au service de la réussite de cet exercice collectif.

Oui, l’exercice a bel et bien été collectif ! Sénat et Gouvernement ont travaillé en bonne intelligence, et nous avons particulièrement apprécié, madame la ministre, l’état d’esprit avec lequel vous avez souhaité, d’emblée, appréhender l’examen de ce texte. Nous nous félicitons également du travail de concertation effectué en amont avec celles et ceux qui ont souhaité discuter et échanger.

Vous avez, à de nombreuses reprises dans la discussion, évoqué la notion de coconstruction, et c’est bien cette démarche positive que nous retenons aujourd’hui.

Nous allons nous prononcer sur un texte équilibré, qui nous permettra de réinventer la réalité du fait ferroviaire dans notre pays. Nous partageons en effet le même constat : notre système ferroviaire est aujourd’hui en bout de course. Nous avons beau nous réfugier derrière tous les argumentaires possibles et imaginables, la vérité est bien celle-ci : l’ouverture à la concurrence qui se profile à l’horizon nous donne l’occasion unique de repenser complètement, de refonder notre logiciel ferroviaire, dans un souci d’efficacité, de modernité et de justice sociale.

L’efficacité, c’est d’abord et avant tout la qualité du service proposé aux usagers, en remettant les collectivités territoriales au cœur de la mêlée s’agissant des trains conventionnés.

Notre discussion et les amendements adoptés font des régions des acteurs incontournables de l’aménagement territorial du ferroviaire, dans le cadre d’un « pacte de confiance passé avec l’État », pour reprendre vos propres termes, madame la ministre.

La modernité, c’est celle de cette grande octogénaire qu’est la SNCF et sa transformation en société anonyme à capitaux intégralement publics. Certes, on peut jouer sur les peurs, mais on ne saurait jouer impunément avec les mots et la réalité.

La vérité est pourtant simple ; l’incessibilité et l’inaliénabilité sont bien les deux mamelles de notre service public ferroviaire et le resteront. Dire le contraire, c’est mentir à nos concitoyens ; c’est mentir aux cheminots ! Le texte est suffisamment clair. Le moment est donc venu d’en finir avec ces petites polémiques.

Forte de cette garantie, notre société nationale a tous les atouts pour se réinventer et se projeter vers l’avenir dans le cadre d’un projet d’entreprise partagé.

C’est la justice sociale, enfin, qui est le cœur de tout le dispositif. Nous avons vu à quel point, sur l’ensemble des travées de cet hémicycle, nous partagions la volonté d’offrir au monde cheminot des perspectives d’avenir.

Agiter là aussi le spectre du statut en tentant d’opposer les uns aux autres ne me paraît pas digne des enjeux du monde ferroviaire. Vous avez en effet réaffirmé tout au long de la discussion, madame la ministre, la ferme volonté du Gouvernement d’accompagner les négociations entre l’UTP, l’Union des transports publics et ferroviaires, et les organisations syndicales pour l’élaboration de la convention collective de la branche ferroviaire. C’est un engagement fort, que vous tiendrez, nous le savons.

Des avancées significatives figurent désormais le texte. Elles ont été élaborées en lien étroit avec les organisations syndicales qui ont souhaité s’inscrire dans le travail de coconstruction que j’évoquais tout à l’heure : le recours au volontariat à l’échelle régionale en cas de transfert, la portabilité des droits, le maintien intégral de la rémunération en cas de transfert, l’unité sociale au sein du groupe, le retour au statut entre la troisième et la huitième année pour un cheminot qui retourne à la SNCF sont autant de mesures significatives qui donnent sens à la réforme.

Il est faux de dire que cette réforme se fait au détriment du monde des cheminots. Ce sont eux les acteurs essentiels de notre grand service public ferroviaire, et des engagements forts ont été pris par le Gouvernement et la représentation nationale.

Il n’appartient bien sûr à personne de dicter leur conduite aux organisations syndicales, mais il semble que le moment soit désormais venu d’ouvrir une nouvelle page de notre grande histoire ferroviaire et de réconcilier les Français de tous bords et de tous horizons avec le chemin de fer.

Vous le savez, nous le savons tous, l’ouverture à la concurrence est une chance dont nous devons nous saisir collectivement. Il convient là aussi de dire les choses sans agiter de chiffons rouges. Je m’en remets sur ce point à notre régulateur, l’ARAFER, et à son excellent rapport sur le sujet : « Lorsque les pays européens ont utilisé l’ouverture à la concurrence comme un instrument visant à relancer le transport ferroviaire de voyageurs, cet instrument a, de manière générale, porté ses fruits et contribué à une amélioration parfois spectaculaire de l’offre, des performances, de la qualité de service et du prix payé par l’usager. » Parce que « là où il y a une volonté il y a un chemin », le groupe La République en marche votera sans hésiter ce texte pour un nouveau pacte ferroviaire.

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