Intervention de Elisabeth Borne

Réunion du 5 juin 2018 à 14h30
Transport fluvial — Débat organisé à la demande du groupe les républicains

Elisabeth Borne :

Pour maintenir les fonctionnalités liées au transport tout en assurant la gestion hydraulique, l’investissement nécessaire pendant la prochaine décennie est bien supérieur aux montants engagés par VNF au cours des dernières années.

Comme pour les réseaux routier et ferroviaire, nous devons assumer, aujourd’hui, cette situation : les investissements nécessaires ont été repoussés depuis des années.

C’est ce constat qui, vous le savez, a conduit à lancer les travaux du Conseil d’orientation des infrastructures, présidé par Philippe Duron. Le rapport qui m’a été remis le 1er février dernier est le fruit d’un travail considérable. Issu d’un large consensus, il a été adopté à l’unanimité des seize membres, experts et élus, dont vos collègues Hervé Maurey, Gérard Cornu et Michel Dagbert, que je veux une nouvelle fois remercier de leur engagement.

Ce travail pose les bases d’une programmation sincère, ambitieuse et réaliste des infrastructures qui sera déclinée dans le projet de loi d’orientation sur les mobilités que je défendrai prochainement devant la Haute Assemblée.

Quel que soit le scénario retenu, les recommandations du COI sur le mode fluvial sont très proches.

Il s’agit, d’abord, d’une hausse significative des crédits de l’État alloués à VNF, au titre de la régénération, afin d’atteindre progressivement les montants nécessaires pour la remise à niveau du réseau, en tenant compte des moyens propres de VNF et des efforts que doit faire cet établissement.

Il s’agit, ensuite, d’un investissement important en termes de modernisation dans les cinq ou dix prochaines années selon le scénario, pour accompagner la fiabilisation des équipements de navigation et la modernisation des méthodes d’exploitation.

Il s’agit, enfin, d’un soutien aux trois grands projets fluviaux étudiés par le COI : l’aménagement de la Lys mitoyenne, la mise à grand gabarit de l’Oise entre Creil et Compiègne et la mise à grand gabarit de la Seine amont entre Bray-sur-Seine et Nogent-sur-Seine.

Il est également un projet sur lequel vous êtes – je le sais – nombreux à être attentifs : le canal Seine-Nord. Je n’y insisterai pas maintenant, car je ne doute pas qu’il sera au cœur de nombreuses questions qui me seront posées.

La programmation des infrastructures de transport que je présenterai au Parlement tiendra bien évidemment compte de ces orientations.

La robustesse et la fiabilité des infrastructures sont en effet un préalable au développement du trafic fluvial. Une situation comme celle de la Seine amont, où les bateliers, les chargeurs céréaliers ou du BTP ont connu d’importantes restrictions de navigation ces derniers mois à la suite des dégâts occasionnés par les crues, n’est pas acceptable.

Au-delà de cet objectif, d’autres efforts doivent être faits.

Je pense d’abord au renforcement de la connexion entre les points maritimes d’import et d’export que sont nos grands ports et les ports intérieurs pour constituer de véritables logiques d’axes logistiques et portuaires le long des axes fluviaux.

Les missions confiées par le Premier ministre au préfet Philizot sur l’axe Seine, au préfet Lalande sur l’axe Nord et à Jean-Christophe Baudouin sur l’axe Méditerranée-Rhône-Saône répondent à cet objectif.

Il s’agit également d’accompagner le transport fluvial de marchandises et de passagers pour qu’il saisisse toutes les opportunités de développement économique, en surmontant quatre grands défis.

Le premier réside dans la performance économique et logistique : il s’agit de limiter le coût des ruptures de charge, de s’intégrer davantage dans les chaînes logistiques et d’attirer de nouveaux trafics. À ce titre, je me réjouis de la validation par la Commission européenne, la semaine dernière, du nouveau plan d’aide au report modal, le PARM, doté d’une enveloppe de 20 millions d’euros sur la période 2018-2022 et mis en place par VNF pour favoriser le report modal vers la voie d’eau, au travers d’une aide aux chargeurs.

Le deuxième défi est celui de la transition numérique ; l’objectif est que le transport fluvial se saisisse de toutes les opportunités offertes par la digitalisation des chaînes logistiques et par la dématérialisation des procédures administratives.

Le troisième défi est celui de la performance environnementale ; il convient de saisir toutes les capacités d’innovation pour que le transport fluvial se positionne comme un mode de transport propre. Le verdissement de la flotte fluviale est ainsi l’un des principaux objectifs du nouveau plan d’aides à la modernisation et à l’innovation, le PAMI, doté de 16, 5 millions d’euros sur la période 2018-2022, également géré par VNF et approuvé par la Commission européenne en même temps que le PARM.

Enfin, le quatrième défi est le défi social ; il s’agit d’offrir des conditions attractives d’emploi.

Pour relever ces défis, le secteur fluvial français doit impérativement se rassembler, afin de mener des actions collectives impliquant les différents intervenants de la chaîne de transport. C’est pourquoi j’ai demandé au préfet François Philizot d’organiser la préfiguration d’une interprofession fluviale, avec l’ensemble des parties prenantes intéressées, dont la réunion de lancement aura lieu demain.

Vous le voyez, nous allons conduire dans les prochaines années une politique volontaire et exigeante en faveur du mode fluvial.

En cohérence avec la démarche de programmation des infrastructures et d’élaboration d’une loi d’orientation sur les mobilités que nous menons actuellement, nous avons engagé avec VNF des discussions sur le modèle économique, les ressources et les objectifs pluriannuels de cet établissement, afin d’améliorer la qualité de service et la disponibilité du réseau, d’optimiser son organisation et de maîtriser les risques. Ces démarches conduiront à un contrat d’objectifs et de performance avec l’établissement, dans lequel je souhaite que l’État s’engage sur des moyens, et VNF sur des résultats.

Programmation des infrastructures de transport, projet de loi d’orientation sur les mobilités, contrat d’objectifs et de performance : voilà l’ensemble des dispositifs qui nous permettront d’établir une vision stratégique claire, avec des objectifs réalistes et sincères, afin de permettre au secteur fluvial de réussir sa transformation et son développement au service de l’aménagement du territoire et de la transition écologique.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion