Le rapport de notre collègue nous permet de disposer d'un utile panorama global de la situation actuelle. Ayons quelques points de comparaison : en 2016, l'Union européenne a reçu un peu plus de 1,2 million de demandes d'asile de la part de primo-demandeurs, chiffre passé à 650 000 en 2017 ; l'Allemagne est passée de 722 000 à 198 000 demandes ; la France, de 77 000 à 91 000, soit des ordres de grandeur bien différents. La part de la France n'est pas encore digne de nos ambitions ni de nos valeurs. L'Allemagne, elle, a consenti d'énormes efforts pour accueillir les demandeurs d'asile, en réorganisant profondément son dispositif. Ne l'oublions pas.
C'est le premier texte qui lie vraiment, de manière assumée, les questions d'asile et d'immigration, jusqu'à présent traitées séparément. Contrairement à celui de 2015, le projet de loi ne transpose aucune directive européenne majeure. Le Conseil d'État l'a indiqué, beaucoup de mesures figurant dans les textes adoptés en 2015 et 2016 n'ont même pas encore été évaluées. Le rapporteur l'a dit, nombre de propositions sont de l'affichage : ce ne sont que des réductions ou des violations des droits de la défense.
Il faut tenir compte du contexte européen et réfléchir à l'avenir de la procédure dite « Dublin », dans laquelle s'inscrivent toutes les politiques d'asile des pays européens. Elle ne fonctionne pas correctement, faisant peser des responsabilités disproportionnées sur trois pays du sud de l'Europe. Elle nous empêche de faire face à des situations humanitaires très difficiles pour ceux qui sont placés sous statut « Dublin » et qui doivent être transférés vers un autre pays européen chargé de l'examen de leur demande d'asile. Cette réforme est essentielle pour avoir enfin un fonctionnement de l'asile correct en Europe.
Et ayons aussi bien en tête que s'il y a une baisse de la pression constatée en Europe depuis 2016, c'est grâce à un accord avec la Turquie. Or des élections présidentielle et législatives sont prévues dans ce pays, et l'une des candidates annonce très clairement son objectif de renvoyer les millions de réfugiés présents sur le territoire de la Turquie.
La seule question des laissez-passer consulaires ne saurait constituer la colonne vertébrale de nos relations avec les pays africains : il y a aussi la question de l'intégration ! Il est important que les demandeurs se sentent respectés et soient traités dignement. Or, actuellement, il faut de longs mois pour espérer obtenir une carte de séjour et de longues années avant de pouvoir demander une naturalisation. Ce sont aussi des points à améliorer.
Enfin, le rapport de la commission de la culture évoque l'attractivité du pays : nous ne pouvons faire l'économie d'une politique du type passeport-talent, pour faire venir les étudiants en France. Or c'est un aspect faible du texte.