Intervention de Philippe Mauguin

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 6 juin 2018 : 1ère réunion
Table ronde sur les produits phytosanitaires autour de m. roger genet directeur général et mme françoise weber directrice générale adjointe de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation de l'environnement et du travail en charge des produits réglementés m. philippe mauguin président-directeur général de l'institut national de la recherche agronomique mme karine brulé sous-directrice de la protection et de la gestion de l'eau des ressources minérales et des écosystèmes aquatiques au ministère de la transition écologique et solidaire m. patrick dehaumont directeur général de l'alimentation au ministère de l'agriculture et de l'alimentation m. didier marteau membre du bureau de l'assemblée permanente des chambres d'agriculture président de la chambre d'agriculture de l'aube

Philippe Mauguin, président-directeur général de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) :

S'agissant du glyphosate, nous avons été chargés par les ministères de l'agriculture, de l'environnement, de la santé et de la recherche de réaliser, dans un délai d'un mois, une synthèse sur les usages et les alternatives existantes.

Nous avons passé au crible les 9 200 tonnes de glyphosate utilisés par l'agriculture française pour comprendre quels types d'usages prévalaient, sur quelles cultures, et pour identifier les alternatives existantes.

En substance, nous avons montré qu'il existait des alternatives dans un certain nombre de cas. Dans d'autres cas, nous avons considéré qu'il existait des impasses lorsque nous n'avons pas pu trouver de solutions autres que le désherbage manuel.

Les situations d'impasses totales représentent 15 % des volumes de glyphosate consommés. On y retrouve par exemple l'agriculture de conservation des sols, qui fait du semis sous couvert et qui intervient peu sur les sols. Dans ce cas, il n'y a pas de possibilité de faire du désherbage mécanique ou de procéder à un enfouissement par le labour. On retrouve également le cas particulier de la viticulture en terrasses, où il est difficile d'intervenir de façon mécanique, de même que les cultures légumières et les cultures de semence, qui ont des cahiers des charges précis qui interdisent toute mauvaise herbe, afin d'éviter celles qui ont un caractère toxique comme les curares.

Pour les autres usages, des solutions existent comme le désherbage mécanique et l'utilisation accrue des couverts végétaux.

Ce que montre le rapport, c'est qu'il n'y aura pas une seule solution alternative. Il ne faut pas se bercer d'illusions : le glyphosate est un herbicide total extrêmement efficace et bon marché ; cela fait depuis 1974 que les entreprises multinationales cherchent une alternative à ce produit, sans succès. Il n'y aura donc pas une seule solution qui pourra s'appliquer à toute l'agriculture. Il faudra combiner plusieurs alternatives. La question qui se pose c'est combien cela coûte, et comment on procède pour permettre, pour chacun des systèmes de production, de développer dans les trois ans des solutions alternatives. Nous sommes prêts à appuyer ces démarches, en mobilisant nos chercheurs et nos unités expérimentales, en lien avec les instituts techniques et l'APCA.

Quelles solutions peut-on trouver pour l'agriculture de conservation des sols ? Les agriculteurs engagés dans cette agriculture nous interpellent, puisque leurs pratiques sont effectivement favorables à la conservation des sols, des vers de terre, des carabes et, plus généralement, de la microbiologie. Mais comment faire sans glyphosate ? Nous avons tenu cette semaine un séminaire de travail avec plus de 180 agriculteurs et chercheurs sur cette problématique. Nous allons continuer d'y travailler.

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