Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mesdames les rapporteurs, mes chers collègues, la proposition de loi visant à moderniser la transmission d’entreprise est l’aboutissement de deux ans de réflexions et d’auditions menées au sein de la délégation aux entreprises par Claude Nougein et Michel Vaspart. Il convient de les féliciter pour leur travail approfondi et méticuleux, ainsi, d’ailleurs, qu’Olivier Cadic pour son rapport d’information relatif à l’accompagnement du cycle de vie des entreprises.
Je remercie également Mme la rapporteur et Mme la rapporteur pour avis de leur travail d’analyse, qui nous a permis d’examiner de façon pertinente et approfondie ce texte en commission.
La transmission d’entreprise, et surtout sa réussite, est un facteur essentiel de la vitalité de notre tissu économique, en particulier dans les territoires ruraux, où l’empreinte de ces entreprises est encore plus forte. En effet, elle ne peut dépendre uniquement du flux naturel – création ex nihilo, disparition –, mais doit intégrer les notions de croissance, de restructuration, de fusion, d’absorption et de transmission. C’est tout un cycle de vie dont la durée est très variable, de quelques mois à plusieurs siècles.
Cette difficulté d’appréhension se retrouve même en termes statistiques, comme cela a été souligné avant moi. Certes, l’on arrive facilement à quantifier les créations et les cessations d’activité. Pour ces dernières, d’ailleurs, avec un décalage, dû à notre formalisme juridique, fait que l’on peut retrouver dans les registres des chambres de commerce des entreprises ayant disparu depuis deux ans, voire davantage –des améliorations, qui ne relèvent pas de la loi, sont donc à attendre dans ce domaine.
Néanmoins, il est très difficile d’évaluer et de qualifier les transmissions d’entreprise. En effet, ces transmissions s’opèrent sous de multiples formes : elles peuvent être progressives ou immédiates – une reprise au tribunal, par exemple –, partielles ou totales – avec toutes les combinaisons imaginables –, avec des démarches très différentes dès lors qu’il s’agit d’une succession familiale – là encore, les cas de figure sont multiples : un repreneur, des héritiers, des membres de la fratrie à indemniser… –, d’une cession à des salariés, d’une vente à un tiers – fournisseur, concurrent ou autre –, d’une reprise dans le cadre d’une procédure judiciaire. Interviennent également la taille et la nature de l’activité.
Je crois par conséquent que l’établissement de statistiques est appelé à se heurter à un certain nombre de difficultés, car il faut aussi tenir compte de la nature même de l’entreprise et du type de transaction, lequel ne peut pas toujours être constaté à un moment donné.
Même si, pour les transmissions et les reprises d’entreprise, on peut relever un certain nombre de points communs dans les démarches en termes d’informations, de procédures, de règles comptables juridiques et fiscales, il n’est pas possible de modéliser la transmission d’entreprise.
Le texte qui nous est proposé contient un certain nombre de dispositions qui peuvent contribuer à un taux de transmissions et à un taux de réussite de celles-ci plus élevé ; c’est d’ailleurs bien là son objectif. À mon sens, il eût été préférable que son titre proposât de « faciliter » cette transmission, plutôt que de la « moderniser », un verbe banal et qui ne traduit pas toujours une forte volonté. Or la volonté des auteurs de ce texte est manifeste.
Cette proposition de loi n’épuise pas le sujet de la transmission d’entreprise, notamment du côté du repreneur : s’il est beaucoup question du cédant, sans doute faut-il proposer aux repreneurs des accompagnements, voire des garanties – ce sujet mériterait d’être encore approfondi. Elle contient toutefois un certain nombre de dispositions facilitant la transmission non seulement dans le domaine fiscal, mais aussi en termes d’informations, d’éducation, de simplification et de sécurisation.
Parmi les mesures très concrètes, on retiendra en particulier l’amélioration du pacte Dutreil, même si elle reste insuffisante. Je formulerai toutefois une réserve concernant l’introduction d’une discrimination portant sur l’âge du cédant, discrimination peu importante sur le plan financier, mais inopportune au regard de la diversité des situations personnelles.
On retiendra également les allégements ou reports d’imposition et, de manière générale, l’assouplissement soit sur le fonds soit en termes de délais d’un certain nombre de contraintes ; la mise en cohérence de certains dispositifs, comme le taux unique pour les droits d’enregistrement, qui s’élèvent à 3 % pour une SARL, contre 0, 1 % une SA ou une SAS à l’heure actuelle, sans que l’on sache vraiment pourquoi.
On retiendra encore l’abaissement du nombre de salariés impliqués dans le rachat de l’entreprise permettant à ceux-ci de bénéficier d’un crédit d’impôt. Cette mesure est très positive : si seulement cinq ou sept salariés sur vingt veulent reprendre l’entreprise, il s’agit tout de même d’une reprise par les salariés, et il faut faciliter leur démarche.
On retiendra enfin la clarification de la définition de la holding animatrice et le retour sur les dispositions de la loi Hamon, dont je souligne les bonnes intentions, mais qui étaient catastrophiques en ce qu’elles fragilisaient un certain nombre de transmissions d’entreprises.