Mes chers collègues, nous avons le plaisir d'accueillir ce matin Mme Isabelle Kocher, directrice générale d'Engie. Elle est accompagnée de M. Jean-Baptiste Séjourné, directeur de la Régulation et de Mme Valérie Alain, directrice Institutions France et Territoires.
Madame la directrice générale, cela fait maintenant un peu plus de deux ans que vous présidez aux destinées d'une entreprise dont vous avez souhaité revoir, si j'ose dire, les fondamentaux pour l'adapter aux grandes mutations du monde de l'énergie. Votre stratégie, symbolisée par le changement de nom de l'entreprise, a consisté à vous désengager massivement de certaines activités très émettrices de gaz à effet de serre ou qui vous exposaient trop aux variations des prix de l'énergie, ce qui s'est soldé par la vente de près de 15 milliards d'euros d'actifs, pour vous réorienter vers les énergies renouvelables, les activités à prix régulés et les services énergétiques, tout en consolidant vos métiers historiques dans le gaz et ses infrastructures.
Cela m'amène à vous poser une première question : alors que vous avez mené à bien une grande partie des cessions que vous aviez annoncées, la stratégie de l'entreprise est parfois questionnée en ce qu'elle ne se traduirait pas suffisamment rapidement par de nouvelles acquisitions d'envergure, dans le renouvelable ou dans les services énergétiques en particulier. Vous seriez, en quelque sorte, au milieu du gué, ou du grand « retournement » initié par l'entreprise, mais le passage à l'offensive se ferait toujours attendre. Pouvez-vous nous expliquer où vous en êtes et quelles sont les perspectives ? Envisagez-vous, en particulier, des cessions supplémentaires - il est parfois question de votre participation dans Suez - dont le produit serait là aussi réorienté vers de nouvelles acquisitions ?
Avec la stratégie de l'entreprise, vous savez naturellement que c'est aussi la gouvernance d'Engie qui a fait l'actualité ces derniers mois, pour aboutir à la confirmation d'un binôme à sa tête, vous-même comme directrice générale et Jean-Pierre Clamadieu succédant à Gérard Mestrallet à la présidence du groupe. Même si ce n'était peut-être pas le schéma vers lequel vous penchiez initialement, pourriez-vous, là aussi, nous rassurer sur la pertinence d'un tel modèle pour l'avenir d'Engie ?
Vous allez sans doute penser que nous n'avons que des sujets de préoccupation mais ma troisième question portera, là aussi, sur un sujet d'inquiétude auquel les représentants des salariés ont sensibilisé nombre d'entre nous : je veux parler de la délocalisation à l'étranger, présentée parfois sous le terme d'« offshorisation », de certaines des activités de relation clientèle qui étaient jusque-là réalisées en interne ou par le biais de sous-traitants, mais toujours en France. Là aussi, pourriez-vous nous donner des chiffres précis, nous dire pourquoi vous avez opté pour cette stratégie ? On nous cite l'exemple de l'Italie, où un consortium d'entreprises s'est engagé à faire de l'autorégulation. On nous dit aussi que cette offshorisation permettrait d'économiser 7 millions d'euros par an : c'est un peu l'épaisseur du trait comparé au résultat d'Engie, qui a atteint 1,4 milliard d'euros en 2017. Et ne craignez-vous pas que cette stratégie nuise à la qualité de la relation client ?
Pourriez-vous aussi réagir aux mises en cause récentes du Médiateur de l'énergie sur certaines pratiques commerciales douteuses dont useraient vos prestataires, qui pratiqueraient notamment un démarchage abusif, et pour lesquelles votre entreprise avait déjà été rappelée à l'ordre par le passé ? Comment entendez-vous remédier définitivement à cette situation ?
Un mot encore sur l'emploi : aux détracteurs de l'offshorisation, vous objectez qu'Engie créé plusieurs milliers d'emplois par an en France. Quels types d'emplois et quelles régions sont concernés ?
Enfin, et parce que nous considérons qu'Engie est un grand acteur énergétique et un atout pour notre pays, pourriez-vous nous dire quelques mots de la contribution de l'entreprise aux débats sur la future programmation pluriannuelle de l'énergie ? Madame la directrice générale, je vous cède sans plus tarder la parole.