Intervention de Isabelle Kocher

Commission des affaires économiques — Réunion du 6 juin 2018 à 9h30
Audition de Mme Isabelle Kocher directeur général d'engie

Isabelle Kocher, directrice générale d'Engie :

La digitalisation des processus représente l'avenir et les centres téléphoniques ne sont nullement l'avenir ! Ne nous berçons pas d'illusions : Engie emploie chaque année de nouveaux collaborateurs et prend 4 500 personnes en apprentissage ! Nous avons veillé à réprimer le démarchage abusif de certaines personnes auprès des particuliers que je ne cautionne naturellement en rien ! En outre, 98 % des problèmes de facturation ont été réglés.

J'en viens à l'amont de nos activités, c'est-à-dire à notre capacité de mettre à disposition de nos clients une énergie compétitive, à la fois décarbonée et fiable, et ainsi la plus durable possible. Dans les débats autour de la PPE et de l'atteinte d'une neutralité carbone en 2050, nous avons veillé à ce que le nouveau système décarboné soit économiquement efficace. Engie préconise, à l'horizon 2050, la baisse des factures, un contenu carbone tendant vers zéro et la solidité des réseaux.

Vos questions portent à la fois sur des technologies actuelles et d'autres en devenir. Notre projet d'entreprise est particulièrement attentif aux horizons de temps : notre plan d'investissement vise le développement le plus abouti des technologies déjà efficaces, tout en gardant les moyens nécessaires pour le développement de nouvelles technologies dans un délai de cinq ans, ces dernières étant évaluées périodiquement à l'aune de pilotes. En France, Engie est le leader de l'énergie solaire et éolienne. Ses plans de développement y sont extrêmement ambitieux. Enfin, nous avons participé aux travaux conduits par Sébastien Lecornu sur la simplification des procédures, qui devraient notamment faire gagner au moins deux ans aux projets éoliens. Aujourd'hui, entre l'identification d'un terrain, la décision d'implantation d'éoliennes et leur mise en service, s'écoulent, en moyenne, près de sept années, le temps de latence étant plus important encore pour l'éolien offshore. Dans ce contexte technologique de grande célérité, nos procédures collectives doivent être plus agiles.

Engie entend développer l'énergie solaire, en densifiant sa présence : notre capacité devrait être quadruplée, qu'il s'agisse de grandes installations ou de couverture de bâtis ou de parkings, où notre société dispose d'un savoir-faire unique et a récemment noué des partenariats.

L'hydroélectricité est une énergie renouvelable qui a d'immenses qualités, dont celle d'être beaucoup moins intermittente que d'autres. Le mix renouvelable du futur devra bien entendu privilégier ce type d'énergie. Engie représente 15 % de parts de marché dans la production d'hydroélectricité mais il faut créer, là aussi, les conditions d'une réelle compétition : l'Union européenne nous presse et il importe désormais de clarifier les conditions des futurs appels d'offres car nos équipes de la Compagnie nationale du Rhône (CNR) ou de la Shem ont besoin de savoir. Le modèle doit évoluer dans les conditions rendues possibles par la loi ; de ce point de vue, le modèle de la CNR, dont le capital est partagé avec les collectivités locales, est très moderne. C'est aussi la seule société qui verse des redevances à ces collectivités. J'espère donc que les dates de remise en concurrence de l'ensemble des concessions seront prochainement précisées et que leurs conditions économiques seront homogénéisées.

D'autres technologies, moins matures, doivent aussi être prises en compte, à l'instar de la méthanation qui désigne la capacité à fabriquer du méthane de synthèse à partir du dioxyde de carbone et de l'hydrogène. Cette technologie implique l'usage de gaz non fossiles qui ne sont pas nécessairement décarbonés, mais dont le carbone était déjà en circulation. Nous sommes sur des cycles de cinq à dix ans et nous avons déjà, vous l'avez rappelé, un pilote à Dunkerque. Les coûts sont encore trop élevés par rapport aux énergies fossiles, même si une division par deux ou trois est probablement accessible. Notre pays doit fixer un cap favorisant la collaboration entre les acteurs et l'émergence de nouvelles technologies, via la massification des pilotes. Ainsi, la technologie des hydroliseurs, nécessaire au développement de l'hydrogène, implique le lancement d'un grand nombre de projets. La France doit fixer une ambition très haute au développement de ces pilotes, afin de détecter les technologies les plus efficaces et de maintenir, sur le territoire national, ces nouvelles filières. En effet, évitons de réitérer ce qui s'est produit lors de la première vague d'énergies renouvelables, où le consommateur, par le jeu de subventionnements, a largement contribué à la maturation de ces technologies dont les filières industrielles n'ont pas été fixées dans notre pays. Or, l'écosystème de l'innovation est extrêmement dynamique en France et la filière du digital et du numérique y est robuste.

Sur la gouvernance, j'ai annoncé publiquement, il y a trois ans, que la dissociation allait dans le sens de l'histoire. Une telle distinction n'est pas très usitée en France, mais il s'agit là d'un système de gouvernance moderne que l'on trouve dans d'autres sociétés internationales de l'énergie.

Engie a pour ambition d'être un leader de la transition énergétique et entend contribuer, de manière positive, à la vie des personnes, à la fois dans les pays développés et émergents. Il ne s'agit pas seulement de lutter contre le réchauffement climatique. Notre posture responsable améliore notre rentabilité et nous sommes fiers d'augmenter les dividendes versés à nos actionnaires, après avoir été contraints de les diminuer pendant trois ans. Fin 2015, le portefeuille de nos activités, qui comprenait la production de charbon et de pétrole, connaissait une décroissance organique de près de 10 % par an. Deux ans après, suite à notre repositionnement, nous connaissons une croissance organique de 5 % par an, qui s'avère la plus dynamique du secteur au plan international. Nous voilà remis dans le coeur de ce que souhaitent les clients publics et privés. Notre retour sur capitaux engagés est passé, dans le même temps, de 6,5 à 7,2 %. Il nous faut réconcilier la création de valeur au sens traditionnel avec la capacité d'avoir un impact positif. Plus on est responsable, plus on est préféré par les clients ainsi que par les jeunes talents, qui sont demandeurs de sens, et par les investisseurs. La valorisation d'Engie en bourse a d'ailleurs repris des couleurs pour cette même raison. Telle est notre vision du progrès harmonieux auquel nous entendons nous consacrer à l'avenir.

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