Intervention de Antoine Karam

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 20 juin 2018 à 9h10
Communication de la mission d'information sur l'état du système éducatif en guyane

Photo de Antoine KaramAntoine Karam :

Je ne saurais être impartial s'agissant de la Guyane. J'ai donc laissé s'exprimer mes deux collègues, que je remercie profondément de s'être penchés sur la situation si particulière de ce territoire et d'avoir pris le temps nécessaire, une semaine, pour l'étudier à fond. Je remercie également la présidente de notre commission d'avoir permis et encouragé ce déplacement. Vous me permettrez quelques remarques.

Tout d'abord, l'importance que revêt cette « guyanisation », cette adaptation du modèle scolaire à la réalité du territoire. Cette une exigence primordiale pour son efficacité. Si nous ne changeons pas de modèle, nous n'améliorerons en rien les résultats du système éducatif, qui sont - comme notre collègue l'a rappelé - alarmants. Les rallonges budgétaires, les trésors de dévouement des enseignants et des personnels de l'éducation nationale n'y feront rien. Quelques petits pas ont été faits, à l'instar du dispositif des intervenants en langue maternelle (ILM) qui est spécifique à la Guyane. Dans certaines écoles maternelles, ces derniers aident les élèves ayant une autre langue maternelle que le français à mieux maîtriser cette langue et leur culture d'origine, en vue de faciliter l'apprentissage de la langue française. C'est un dispositif intéressant, nous l'avons vu : l'avenir réside cependant à mon sens dans la constitution d'un corps d'enseignants du primaire formés à ces spécificités et connaissant les langues et les traditions locales. S'il faut savoir attirer des enseignants d'ailleurs, ces enseignants ne pourront, pour l'essentiel, ne venir que de Guyane ; c'est pourquoi il faut mener le plus grand nombre possible de jeunes guyanais vers les métiers de l'enseignement.

Vous avez beaucoup entendu le mot « expérimentation ». Du fait de ses spécificités, la Guyane doit être un terrain d'expérimentation et d'innovation. En matière de recrutement des enseignants, par exemple, la Guyane peut être aux avant-postes ; les enseignements qui en seront tirés pourront être transposés dans l'hexagone.

La Guyane possède d'immenses atouts et une jeunesse magnifique. C'est une grande richesse que nous ne pouvons-nous permettre de laisser sur le bord du chemin, sans diplôme, sans travail et sans perspective. Sans quoi ils continueront d'être la proie des trafiquants de drogue, comme l'illustrent les arrestations quotidiennes de « mules » dans les avions en provenance de Guyane.

Par notre travail et nos recommandations, nous espérons indiquer le chemin d'un nouveau modèle éducatif pour la Guyane, plus proche de ses besoins et plus efficace. Dans l'éducation comme dans les autres politiques publiques, l'adaptation aux besoins des territoires doit primer. S'adressant à la population guyanaise le 30 avril 1960, Charles de Gaulle ne disait-il pas « qu'il est conforme à la nature des choses qu'un pays qui a son caractère aussi particulier que le vôtre et qui est, en somme, éloigné, ait une autonomie proportionnée aux conditions dans lesquelles il doit vivre » ? Cinquante-huit ans après, nous ne pouvons que constater que la centralisation et le jacobinisme demeurent ancrés.

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