Intervention de Maurice Antiste

Réunion du 25 juin 2018 à 14h30
Immigration droit d'asile et intégration — Article 30

Photo de Maurice AntisteMaurice Antiste :

À l’heure actuelle, s’agissant de la disposition visée par la présente modification législative, le 6° de l’article L. 313-11 6° du CESEDA prévoit qu’une carte de séjour temporaire d’un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit à l’étranger ne présentant pas une menace pour l’ordre public et ne vivant pas en état de polygamie « qui est père ou mère d’un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu’il établisse contribuer effectivement à l’entretien et à l’éducation de l’enfant dans les conditions prévues par l’article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans […] ».

L’application de cette disposition se heurte cependant à une suspicion quasiment systématique des administrations préfectorales, eu égard au risque de fraude à la reconnaissance de paternité.

Si l’objectif de lutte contre la fraude paraît légitime, le I de l’article 30 introduit une nouvelle condition de délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » au parent étranger d’un enfant français prévue au 6° de l’article L. 313-11 du CESEDA en imposant au parent français ayant reconnu l’enfant de démontrer qu’il contribue de manière effective à l’entretien et à l’éducation de celui-ci. Or, une telle mesure risque de porter atteinte au respect de la vie privée et familiale des personnes étrangères concernées et de constituer une violation du principe de non-discrimination en lien avec la nationalité.

De plus, le II de l’article 30 prévoit d’insérer dans le CESEDA cinq nouveaux articles qui créeraient un dispositif d’alerte du procureur de la République par l’officier de l’état civil, à l’instar de ce qui existe pour les suspicions de mariages blancs. L’officier de l’état civil serait ainsi en mesure de saisir le procureur de la République s’il existe des indices sérieux laissant présumer, au vu de l’audition de l’auteur de la reconnaissance de l’enfant, que celle-ci est frauduleuse. Néanmoins, l’absence de définition précise de la notion d’« indices sérieux laissant présumer du caractère frauduleux de la reconnaissance » est problématique, puisque ce dispositif pourrait créer des atteintes non négligeables aux droits des parents et enfants concernés. L’encadrement de cette notion permettrait d’éviter l’automaticité des signalements au parquet, notamment dans l’hypothèse où l’un des parents serait dépourvu de titre de séjour, cette circonstance étant susceptible d’induire une présomption de fraude à l’encontre des étrangers en situation irrégulière.

Ces dispositions semblent, en outre, ne pas être nécessaires au regard de l’objectif de lutte contre la fraude, puisque les dispositifs légaux actuels permettent déjà de faire obstacle aux situations de fraude par l’annulation des reconnaissances frauduleuses, le retrait des titres d’identité ou de séjour indûment délivrés et le recouvrement des prestations indues.

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