Intervention de Pierre Schoeffler

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 7 juin 2018 à 9h10
L'avenir des relations entre les générations : démocratie patrimoine emploi

Pierre Schoeffler, conseiller scientifique de l'IEIF, conseiller du président du Groupe La Française :

L'Institut de l'épargne immobilière et foncière est un institut de recherche indépendant. C'est une association loi 1901 financée par ses membres. Nous avons participé aux travaux de la chaire « transition démographique, transition économique » et nous nous sommes intéressés au problème de fluidification du patrimoine immobilier en France, et aux techniques utilisées dans les pays étrangers, en particulier l'Allemagne, la Suède et les États-Unis. Nous avons essayé de comprendre la structure du patrimoine des ménages dans ces différents pays et la façon dont elle pouvait être mise en relation avec la dynamique économique de ces pays. La structure du patrimoine en France est très particulière. Les deux tiers du patrimoine des Français sont constitués par le logement, le reste étant composé de titres financiers détenus au travers de l'assurance-vie. Or, dans les autres pays, les fonds de pension occupent une place importante. En Suède, le patrimoine est composé pour un tiers du logement, un tiers de fonds de retraite par capitalisation et un tiers de titres détenus sur les marchés financiers. Aux États-Unis, le logement constitue seulement 25 % du patrimoine des ménages.

Comment expliquer ces différences ? Les Français constituent leur retraite par le logement en raison de l'absence de fonds de pension. Cependant, ce système est inégalitaire, car chacun constitue son patrimoine en logement et le combine avec l'assurance-vie afin d'optimiser les frais de succession. Ce comportement s'est avéré rentable ces dernières années, car l'augmentation du prix des logements était plus importante que la hausse du cours des actions, ils ont donc maximisé la constitution de leurs fonds de retraite. Néanmoins, ce système est risqué en raison des disparités importantes du prix du logement selon les territoires.

Nous constatons que les pays disposant d'une structure de patrimoine dans laquelle le logement occupe une part peu importante connaissent une croissance économique élevée. En effet, la présence de fonds de pension puissants permet d'irriguer de façon plus efficace l'ensemble du financement de l`économie.

Dans les autres pays, les logements qui ne sont pas détenus par des particuliers sont la propriété de sociétés immobilières, elles-mêmes détenues par des fonds de pension. Ce système est plus égalitaire en termes de répartition du patrimoine, car les fonds de pension investissent dans un portefeuille diversifié de logements, et non pas dans un seul logement. Les foncières cotées, très importantes en Allemagne, en Suède et aux États-Unis (où elles représentent la principale capitalisation de l'immobilier coté) opèrent une gestion locative rigoureuse. De plus, il s'agit d'instruments de taille importante qui peuvent capitaliser jusqu'à 20 milliards d'euros.

Dans Paris au XXe siècle, publié en 1860, Jules Verne estimait que Paris serait détenu uniquement par une gigantesque foncière qui détiendrait tous les logements, serait cotée en bourse et serait détenue par les Parisiens.

Au sujet de la fiscalité, l'exemple de la Suède est intéressant. Les réformes menées actuellement par le gouvernement français sont similaires à celles qu'a connues la Suède dans les années 90. Dans ce pays, il n'existe plus d'impôt sur la succession et d'impôt sur les donations. L'idée d'imposer de façon importante le patrimoine pour que les individus le transmettent est fausse, car l'exemple suédois montre que l'inverse se produit.

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