Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je crois que nous partageons tous dans les grandes lignes le constat dressé par notre rapporteur concernant le fonctionnement actuel du système d’accueil et d’intégration des étrangers sur notre territoire : la saturation de nos capacités d’hébergement d’urgence, qui menace la dignité des demandeurs d’asile ; les difficultés de l’État à faire respecter les décisions de refus d’admission à l’asile et au séjour, et les décisions d’éloignement qui en découlent ; l’insuffisance des moyens consacrés à l’intégration des personnes étrangères en situation régulière sur notre territoire.
Il est donc regrettable que nous ne soyons pas parvenus à dépasser nos clivages politiques, afin de nous livrer à une évaluation scrupuleuse des dispositifs actuels et de leurs limites.
J’avais déjà évoqué, lors de la discussion générale, la position de notre groupe sur le sujet : la dimension prospective est excessivement laissée de côté.
Peu de choses sur les outre-mer, qui pour beaucoup sont perçus comme une porte d’entrée vers la France et l’Europe. Rien sur la remise à plat des instruments de développement français.
La proposition de notre collègue M. Thani Mohamed Soilihi et les échanges qui en ont découlé ont révélé également la difficulté de légiférer sur l’admission au séjour sans discuter à la fois des conditions d’attribution de la nationalité française. Une approche globale nous a manqué.
Sans anticiper les discussions en cours sur l’évolution du système de Dublin, le texte se borne, pour l’essentiel, à modifier de nouveau les aspects procéduraux des demandes d’asile et d’éloignement d’étrangers en situation irrégulière.
Malgré quelques modifications progressistes aux marges du texte, venues de la gauche de l’hémicycle, le rééquilibrage proposé par notre rapporteur ne nous convient pas tout à fait, dès lors qu’il déplace le curseur de la fermeté à l’égard des étrangers en attente de décision ou en situation irrégulière, sans adapter celui de la protection de leurs droits et libertés fondamentales.
Cet équilibre est pourtant précieux. Comme l’écrivait Blaise Pascal, « la justice sans la force est impuissante, mais la force sans justice est tyrannique ».