Plusieurs mois après la conclusion des États généraux de l’alimentation, qui ont suscité, semble-t-il, beaucoup d’espérances, l’heure est venue pour le Sénat d’examiner le projet de loi qui en résulte.
Ce texte prétend créer les conditions d’augmentation des revenus des producteurs. C’est une légitime priorité nationale. Comment peut-on en effet assurer la survie de notre agriculture, élément essentiel de notre souveraineté nationale, si le métier de paysan n’est plus assez attractif, faute de revenus suffisants ? Les paysans doivent être respectés et bénéficier de la même modernité que dans les autres pays européens.
Monsieur le ministre, soyez assuré que vous trouverez toujours un soutien appuyé dans la Haute Assemblée dès qu’il s’agira d’assurer une meilleure rémunération de nos agriculteurs, actifs ou retraités. §De nombreuses filières souffrent d’une guerre des prix toujours plus vivace. Les revenus des producteurs n’ont pas à financer les promotions des consommateurs. Tout ce qui permettra aux producteurs de mieux peser dans la chaîne de valeur d’un produit est essentiel. Tout ce qui permettra aux agriculteurs de vivre décemment de leur métier recevra notre aval.
Toutefois, ce projet de loi prend un risque immense : celui de ne rien changer pour nos agriculteurs. Car, après tant de promesses semées par le Président de la République et par le Gouvernement, je crains que la récolte ne contienne quelques déceptions, pour trois raisons principales.
Premièrement, le projet de loi ne concerne pas forcément la majorité des filières. Puisque le principal levier est la contractualisation, on peut considérer que seulement 40 % des producteurs seront concernés par le texte.
Deuxièmement, le projet de loi ne parle que du prix, qui n’est qu’une composante du revenu. Il ne parle ni des charges, ni de la fiscalité, ni des aléas climatiques et économiques, ni des autres sources de revenus, comme la politique agricole commune.
À cet égard, monsieur le ministre, il est paradoxal de palabrer pendant plusieurs mois sur une très improbable hausse des revenus agricoles, alors que vous êtes peut-être, nous semble-t-il, en train de perdre les négociations sur le budget de la politique agricole commune à Bruxelles !