J'ai apprécié, madame la présidente, que vous parliez de cheminement. Certes, il s'agit d'un problème difficile et douloureux. Nous avons tous envie d'améliorer la protection des enfants. Je suis moi-même à l'initiative d'une proposition de loi, avec mon groupe parlementaire, qui a proposé le seuil d'âge de quinze ans et la présomption irréfragable. Ensuite, au fil des auditions, des échanges et de réflexion, mon avis a évolué. J'en suis venue à la proposition qui a été formulée par Annick Billon et Laurence Rossignol. Je pense désormais qu'il convient de sortir du piège de la définition pénale du viol. En effet, le viol implique toujours de prouver l'existence de la contrainte, de la surprise, de la violence ou de la menace. Or, à mon sens, ces critères ne fonctionnent pas pour les enfants. En effet, les enfants ne se définissent pas par leur apparence physique, mais par leur absence de maturité psychologique et sexuelle. Nous voyons bien que ce champ reste ouvert. Quelqu'un peut sembler plus âgé qu'il ne l'est, tout en faisant preuve d'une grande immaturité. C'est précisément ce que nous devons protéger.
Un tout autre débat se développe d'ailleurs aujourd'hui. Un groupe de gynécologues a récemment alerté sur l'accès à la pornographie des petits enfants, autour de huit ans, et sur les dégâts terribles qu'entraîne l'influence de ses codes par définition violents sur les relations sexuelles, avec des conséquences telles que des lésions physiques sur les jeunes filles. La norme devient le film pornographique, et ce dès le plus jeune âge. Par conséquent, nous devons réfléchir à la meilleure manière de protéger les enfants. Il me semble donc que le fait de dire que toute pénétration est un crime, en résumé, exclut les problématiques de surprise ou de menace.
Par ailleurs, en voulant trop bien faire, nous ne devons pas nous placer inconsciemment du côté du prédateur. Nous ne devons pas nous mettre à sa place, mais du côté de la victime. Je suis choquée de constater qu'aujourd'hui, alors qu'une lutte importante existe contre les violences faites aux femmes, nous nous trouvons loin du compte au niveau des mineurs. Par conséquent, l'idée que nous soumettons peut permettre de créer une loi protectrice. J'espère que vos réflexions évolueront également en ce sens.
Notre responsabilité consiste à poser un interdit sur une relation sexuelle entre un adulte et un mineur. Un mineur ne peut pas avoir conscience de ce qu'il subira en suivant un adulte. En effet, nous savons que les ressources et l'imagination des prédateurs sont sans fin pour entraîner leurs victimes. J'appelle donc à ne pas dévier de cette ligne. En l'état, la loi risque d'être décevante parce qu'elle n'est pas véritablement protectrice. Nous aurons raté notre cible alors que nous souhaitons tous protéger les victimes.