Nous butons sur la question de l'intentionnalité, qui constitue le coeur du problème. Je partage totalement les propos de Laurence Cohen. Au bout du compte, la loi se préoccupe beaucoup plus des risques de poursuivre un auteur qui n'aurait pas eu conscience de l'âge de sa victime que de protéger les enfants. Je vois pour ma part dans ces arguments l'expression d'une solidarité, voire d'une confraternité. J'ai entendu certains me dire : « Tu veux envoyer en prison un homme qui s'est fait prendre par une Lolita ? ». Voilà le fantasme qui se cache derrière ces réticences sur le seuil d'âge. Je souligne en outre que nous n'évoquons jamais les « Lolitos »... Nous avons également entendu des propos sur la soi-disant maturité sexuelle des jeunes filles issues des départements d'outre-mer. L'impression qui prédomine maintenant est celle d'une résistance et d'une solidarité profonde entre les prédateurs. Malheureusement, le mouvement #Metoo n'a pas tout changé. Il a toutefois permis de mesurer cette complaisance et cet entre-soi qui permettent de perpétuer les violences faites aux femmes et aux enfants depuis des siècles.
S'agissant de l'intentionnalité, je rappelle que des personnes sont envoyées aux assises pour avoir braqué une boulangerie avec un pistolet en plastique au motif que l'intentionnalité de braquer était en effet présente ! Dans l'« affaire » de Pontoise, la petite fille avait montré son carnet de correspondance à l'auteur. Il a donc vu dans quelle classe elle se trouvait et pouvait en déduire son âge.
En réalité, les cas présentant des agresseurs soi-disant trompés par l'apparence physique de leur victime restent marginaux. Nous ne légiférons pas pour des cas particuliers, mais pour les questions centrales, à savoir la prédation et les violences sexuelles sur les mineurs.
Enfin, je le redis, cette loi est porteuse de déceptions et de frustrations. Vos arguments ne m'ont pas convaincue.