Intervention de André Reichardt

Commission des affaires européennes — Réunion du 21 juin 2018 à 9h00
Politique régionale — Politique de cohésion de l'union européenne : proposition de résolution européenne du groupe de suivi

Photo de André ReichardtAndré Reichardt :

Mme Angèle Préville, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, M. Bernard Delcros, au nom de la commission des finances et moi-même, au nom de la commission des affaires européennes, allons vous présenter une proposition de résolution européenne cosignée par tous les membres du groupe de suivi sur la politique de cohésion régionale. Cette proposition exprime ce qui devrait orienter la politique de cohésion régionale 2021-2027, en particulier pour la France.

Le groupe de suivi a procédé à trois auditions, celle de M. Serge Morvan, commissaire général à l'égalité des territoires et préfigurateur de l'agence nationale de la cohésion des territoires, celle de M. Renaud Muselier, président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et président de la commission « Europe » de Régions de France, et, enfin, celle des deux secrétaires généraux adjoints du Secrétariat général des affaires européennes.

Cette proposition de résolution s'inscrit dans le calendrier budgétaire européen : tous les sept ans, la Commission européenne propose au Conseil et au Parlement européen un cadre financier pluriannuel, le prochain devant couvrir la période 2021-2027. Les propositions concernant la future la politique de cohésion ont été publiées très récemment, au début de ce mois ; les personnes que nous avons entendues venaient juste d'en prendre connaissance.

À l'heure de la réduction des ressources que le Brexit va occasionner, au moment où l'Union européenne s'est donné de nouvelles priorités - la défense, la sécurité, le climat, les migrations -, la politique de cohésion paraissait menacée aux yeux de nombre d'entre nous. De fait, si le cadre financier pluriannuel 2021-2027 prévoit une quasi-stabilité du Feder (+1 %) et une réduction de moins 6 % pour le FSE+, il prévoit une diminution de 46 % du seul Fonds de cohésion. La France n'est pas éligible à ce fonds, mais cette diminution, si elle était confirmée, affecterait particulièrement les pays dits « de Visegrád », la Hongrie, la République tchèque, la Slovaquie et la Pologne.

La Commission prend ainsi acte des croissances dynamiques des pays de l'Est de l'Europe dans la période écoulée - la carte que le président Maurey vient d'évoquer le montre -, due en partie à l'effet positif de la politique de cohésion dont ces pays ont été jusqu'à présent les principaux bénéficiaires - il peut d'ailleurs leur arriver de l'oublier... Les ressources réduites seraient donc réorientées vers les États du sud, confrontés à des difficultés persistantes, comme la Grèce, l'Espagne, l'Italie, la Roumanie ou la Bulgarie, dont les dotations prévisionnelles augmentent.

Quelques mots des éléments transversaux de la politique de cohésion telle que la Commission européenne la propose. Le Feder se concentrera sur cinq objectifs stratégiques : une Europe plus intelligente grâce à la transformation économique innovante ; une Europe plus verte et à faible émission de carbone ; une Europe plus connectée ; une Europe plus sociale grâce à la mise en oeuvre du socle européen des droits sociaux ; une Europe plus proche des citoyens grâce au développement durable et intégré des zones urbaines, rurales et côtières au moyen d'initiatives locales. Il faudra décliner ces différentes priorités, qui sont très importantes pour notre pays.

Le FSE+ investira dans trois grands domaines : l'éducation, la formation et l'apprentissage tout au long de la vie ; les marchés du travail et l'égalité d'accès à un emploi de qualité ; l'inclusion sociale, la santé et la lutte contre la pauvreté. Ce fonds regroupera cinq fonds : trois fonds en gestion partagée - le FSE proprement dit, l'initiative pour l'emploi des jeunes et l'aide aux plus démunis - et deux fonds gérés par la Commission, liés à l'inclusion sociale et à la santé.

La Commission propose ensuite, en réponse à une critique générale, plusieurs mesures de simplification : un règlement unique couvrant désormais sept fonds, dont le Feder, le FSE+ et le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (Feamp) mais pas le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) ; la suppression des longues procédures d'accréditation des autorités de gestion ; la suppression de la certification et de la réserve de performance ; l'instauration de l'audit unique ; la différenciation dans l'intensité des contrôles européens en fonction de l'ampleur des projets et des performances administratives respectives des États membres.

La programmation se veut aussi plus flexible, elle sera faite pour cinq ans avec un examen à mi-parcours en 2025 pour les deux dernières années. Une appréciation sera alors portée sur la performance des projets, et d'éventuelles réorientations des priorités pourraient être décidées pour la dernière phase de programmation.

Le lien avec les observations de la Commission dans le cadre du semestre européen est renforcé, surtout pour le FSE+. La prise en compte de ces recommandations spécifiques par État serait faite par la Commission en début et en milieu de programmation. Les éventuelles suspensions des concours financiers qui pourraient ultimement résulter du non-respect par un État membre de ces recommandations seraient toutefois limitées aux engagements et non aux paiements, et elles seraient plafonnées.

Autre innovation, l'instauration d'une conditionnalité de respect de l'État de droit pour bénéficier des financements européens. Cette condition vise les cas où des législations nationales mettraient en cause, par exemple, le principe d'indépendance de la justice, risquant ainsi de porter atteinte à une saine gestion des fonds publics européens. Il s'agit, en clair, d'écarter les risques de corruption. Quel en est le mécanisme ? La Commission proposerait au Conseil de suspendre ou d'interrompre les versements des fonds de cohésion. Cette proposition ne pourrait être rejetée par le Conseil qu'à la majorité qualifiée inversée, difficile à réunir. Cela étant, afin de ne pas pénaliser les bénéficiaires finaux des fonds, l'État en cause devrait se substituer à la Commission pour assurer le financement des projets.

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